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de la connaissance

carré, donc l’isogone est dans le carré. Et cette manière d’énoncer n’est pas à mépriser, car en effet le prédicat est dans le sujet, ou bien l’idée du prédicat est enveloppée dans l’idée du sujet. Par exemple, l’isogone est dans le rectangle, car le rectangle est la figure dont tous les angles droits sont égaux entre eux, donc dans l’idée du rectangle est l’idée d’une figure dont tous les angles sont égaux, ce qui est l’idée de l’isogone. La manière d’énoncer vulgaire regarde plutôt les individus, mais celle d’Aristote a plus d’égard aux idées ou universaux. Car disant « tout homme est animal », je veux dire que tous les hommes sont compris dans tous les animaux ; mais j’entends en même temps que l’idée de l’animal est comprise dans l’idée de l’homme. L’animal comprend plus d’individus que l’homme, mais l’homme comprend plus d’idées ou plus de formalités ; l’un a plus d’exemples, l’autre plus de degrés de réalité ; l’un a plus d’extension, l’autre plus d’intention. Aussi peut-on dire véritablement que toute la doctrine syllogistique pourrait être démontrée par celle de continente et contento, du comprenant et du compris, qui est différente de celle du tout et de la partie ; car le tout excède toujours la partie, mais le comprenant et le compris sont quelquefois égaux comme il arrive dans les propositions réciproques.

§ 9. Ph. Je commence à me former une tout autre idée de la logique que je n’en avais autrefois.. Je la prenais pour un jeu d’écolier, et je vois maintenant qu’il y a comme une mathématique universelle de la manière que vous l’entendez. Plût à Dieu qu’on la poussât à quelque chose de plus qu’elle n’est encore, afin que nous y pussions trouver ces vrais secours de la raison dont nous parlait Hooker, qui élèveraient les hommes bien au-dessus de leur présent état. Et la raison est une faculté qui en a d’autant plus besoin que son étendue est assez limitée et qu’elle nous manque en bien des rencontres. C’est 1o parce que souvent les idées mêmes nous manquent. § 10. Et puis 2o elles sont souvent obscures et imparfaites : au lieu que là où elles sont claires et distinctes comme dans les nombres, nous ne trouvons point de difficultés insurmontables et ne tombons dans aucune contradiction. § 11. 3o Souvent aussi la difficulté vient de ce que les idées moyennes nous manquent. L’on sait qu’avant que l’algèbre, ce grand instrument et cette preuve insigne de la sagacité de l’homme, eût été découverte, les hommes regardaient avec étonnement plusieurs démonstrations des anciens mathématiciens. § 12. Il arrive aussi 4o qu’on bâtit sur de faux principes, ce