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de la connaissance

naître et ne peut avoir plus de probabilité que ces motifs, et entre l’assentiment surnaturel, qui est un effet de la grâce divine. On a fait des livres exprès sur l’analyse de la foi, qui ne s’accordent pas tout à fait entre eux ; mais puisque nous en parlerons dans la suite, je ne veux point anticiper ici sur ce que nous aurons à dire en son lieu.

Chap. XVII. — De la raison.

§ 1. Ph. Avant que de parler distinctement de la foi, nous traiterons de la raison. Elle signifie quelquefois des principes clairs et véritables, quelquefois des conclusions déduites de ces principes et quelquefois la cause, et particulièrement la cause finale. Ici on la considère comme une faculté, par où l’on suppose que l’homme est distingué de la bête et en quoi il est évident qu’il la surpasse de beaucoup. § 2. Nous en avons besoin, tant pour étendre notre connaissance que pour régler notre opinion, et elle constitue, à le bien prendre, deux facultés qui sont la sagacité pour trouver les idées moyennes, et la faculté de tirer des conclusions ou d’inférer. § 3. Et nous pouvons considérer dans la raison ces quatre degrés : 1o Découvrir des preuves ; 2o les ranger dans un ordre, qui en fasse voir la connexion ; 3o s’apercevoir de la connexion dans chaque partie de la déduction ; 4o en tirer la conclusion. Et on peut observer ces degrés dans les démonstrations mathématiques.

Th. La raison est la vérité connue dont la liaison avec une autre moins connue fait donner notre assentiment à la dernière. Mais particulièrement et par excellence on l’appelle raison, si c’est la cause non seulement de notre jugement, mais encore de la vérité même, ce qu’on appelle aussi raison à priori, et la cause dans les choses répond à la raison dans les vérités. C’est pourquoi la cause même est souvent appelée raison, et particulièrement la cause finale. Enfin la faculté qui s’aperçoit de cette liaison des vérités ou la faculté de raisonner est aussi appelée raison, et c’est le sens que vous employez ici. Or cette faculté est véritablement affectée à l’homme seul ici-bas, et ne parait pas dans les autres animaux ici-bas : car j’ai déjà fait voir ci-dessus que l’ombre de la raison qui se fait voir dans les bêtes n’est que l’attente d’un événement semblable dans un cas qui parait semblable au passé, sans connaître si la même raison a lieu. Les hommes mêmes n’agissent pas autrement dans le cas où ils sont