Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 9, 1838.djvu/370

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de se tenir sur le qui vive. Dougal subit un autre interrogatoire très-sévère, mais il persista dans ses déclarations précédentes ; et le capitaine lui ayant reproché de nous conduire par des chemins qui paraissaient suspects et dangereux, il répondit avec une espèce d’humeur qui me parut assez naturelle : « Ce n’est pas moi qui les ai faits. Si ces messieurs aiment les grandes routes, ils auraient dû retourner à Glasgow. »

Cette réponse mit fin à l’interrogatoire, et nous nous remîmes en marche.

Notre route, quoique nous conduisant vers le lac, avait été jusque là si ombragée par les bois, que nous n’avions pu entrevoir que de temps à autre cette belle nappe d’eau ; mais tout à coup le chemin s’étant séparé du bois et venant côtoyer le bord du lac, nous pûmes en admirer à notre aise la vaste surface qui, maintenant que l’air du matin ne l’agitait plus, réfléchissait dans un calme majestueux les hautes et sombres montagnes couvertes de bruyères, et les masses grises de rochers qui l’environnent. Bientôt les bords du rivage se rétrécirent tellement et devinrent si escarpés, qu’ils ne nous permettaient plus d’autre passage que l’étroit sentier que nous suivions, et qui était dominé par des rochers, du haut desquels on aurait pu nous écraser en roulant des pierres, sans qu’il eût été possible de faire la moindre résistance. Ajoutez à cela que la route suivait les détours de chaque promontoire et de chaque baie du lac, ce qui souvent empêchait la vue de s’étendre à cent pas devant et derrière nous. Notre commandant parut concevoir quelque inquiétude sur notre position ; il réitéra l’ordre à ses soldats de se préparer à une alerte, et menaça plusieurs fois Dougal de le mettre à mort sur-le-champ s’il l’avait attiré dans quelque embuscade. Celui-ci écouta ses menaces d’un air d’impassibilité stupide, qui pouvait aussi bien provenir du sentiment de son innocence que de son inflexibilité dans le parti qu’il avait pris.

« Si ces gentilshommes cherchent Gregarach le rouge, dit-il, il est certain qu’ils ne peuvent pas s’attendre à le trouver sans courir quelque danger. »

Au moment où le montagnard prononçait ces mots, le caporal qui commmdait l’avant-garde cria halte, et envoya un de ses hommes dire au capitaine que le défilé qui s’ouvrait devant eux était occupé par des montagnards postés sur un point élevé qui paraissait inexpugnable. Presque au même instant un soldat de l’arrière-garde vint dire qu’il avait entendu le son d’une corne-