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conduits avec adresse, exécutés avec autant de rapidité que d’audace, lui réussirent presque toujours. De même que Robin Hood d’Angleterre, il était un voleur humain et sensible, qui, tout en dépouillant les riches, secourait libéralement les pauvres. Peut-être cette conduite n’était-elle pas exempte de quelque politique ; mais la tradition universelle du pays lui assigne un motif plus généreux. Tous les gens à qui j’ai parlé de Rob-Roy, et j’en ai vu plusieurs, dans ma jeunesse, qui l’avaient connu personnellement, lui donnent le caractère d’un homme bienveillant et humain « à sa manière. »

Ses idées, en morale, étaient celles d’un chef arabe ; telles enfin qu’ils les devaient à sa grossière éducation. Si Rob-Roy eût raisonné sur le genre de vie que, par son choix ou par nécessité, il avait adopté, à coup sûr il se serait représenté comme un homme courageux, qui, dépouillé de ses droits naturels par la partialité des lois, s’efforcerait de les reprendre par sa force personnelle. Il est montré raisonnant ainsi, dans les vers de mon excellent ami Wordsworth ;


Disons qu’il était aussi prudent que brave, conséquent dans ses idées autant que hardi dans ses actions ; la loi naturelle était sa loi suprême.

Rob disait : « Qu’est-il besoin de livres ? brûlez les rayons qui les portent. Ils nous irritent contre nos semblables, et souvent contre nous-mêmes.

« Les lois, impuissantes pour nous conduire au bien, sont l’ouvrage des passions humaines ; et cependant, insensés que nous sommes ! nous nous égorgeons pour les défendre.

« Dans leur honteux aveuglement, les hommes oublient les notions du plus simple bon sens ; moi, je trouve dans mon cœur une règle à laquelle je suis fidèle.

« Voyez, les êtres qui courent dans les forêts, ceux qui nagent dans les eaux, ceux qui fendent l’air de leur aile : chez eux point de querelle durable ; leurs jours s’écoulent dans la paix, dans la paix du cœur.

« Pourquoi ? parce que les lois de la nature leur suffisent. À celui qui peut prendre, elles disent : Prends ; à celui qui a la force. Garde.

« Cette leçon est facile à apprendre ; c’est un phare visible à tous les yeux : aussi, parmi eux, le fort n’est-il jamais provoqué à une cruauté inutile ;

« Il réprime les caprices ambitieux ; il abaisse ceux qui tentent de s’élever contre lui ; chacun règle ses désirs sur sa force.

« Toute créature humaine se soutient ou est renversée par la force du courage