Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 9, 1838.djvu/258

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Mon père m’avait souvent repris de cette disposition vagabonde de mon esprit, qui provenait peut-être d’une vivacité d’imagination à laquelle il était étranger lui-même ; et, en me trouvant ainsi tenté de me livrer à tout moment à de nouvelles distractions, je me rappelais le temps où il me conduisait par la main à la chapelle de M. Shower en me recommandant avec instances de bien employer un temps qu’on ne regagnait jamais quand on l’avait perdu. En ce moment, ce souvenir, loin de fixer mon attention, acheva d’absorber le peu qui me restait, en retraçant à ma mémoire le dangereux état de ses affaires, j’essayai, du ton le plus bas possible, de demander à André si quelqu’un des associés de la maison Mac-Vittie et compagnie faisait partie de l’assemblée ; mais André, tout entier à l’attention qu’il donnait au sermon, ne me répondit qu’en me poussant fortement le coude, comme pour m’engager à rester tranquille : je reportai ensuite mes yeux sur cette foule de figures qui, le cou tendu, dirigeaient leurs regards sur la chaire comme sur un point central commun, et m’efforçai, sans plus de succès, d’y découvrir la physionomie composée, j’ose même le dire, presque commerciale d’Owen ; sous les larges chapeaux des bourgeois de Glasgow, non plus que sous ceux plus larges encore des habitants du Lanarkshire, je ne pus rien découvrir qui ressemblât à la modeste perruque, aux manchettes empesées et à l’habillement de couleur noisette qui distinguaient le premier commis de la maison Osbaldistone et Tresham. Mon inquiétude se ranima alors avec une telle violence, que non seulement elle me fit oublier la nouveauté du tableau qui l’avait d’abord distraite, mais même, pour ainsi dire, le sentiment des convenances. Je tirai André par la manche en lui déclarant mon intention de quitter l’église et de continuer mes recherches comme je pourrais ; mais aussi obstiné dans l’église souterraine de Glasgow que sur les monts Cheviot, il fut quelque temps sans daigner me répondre ; enfin, voyant qu’il n’y avait pas d’autre moyen de me faire tenir tranquille, il se résolut à me dire qu’une fois dans l’église nous ne pouvions pas la quitter avant que le service fût fini, parce qu’on fermait les portes aussitôt que les prières commençaient. M’ayant donné cet avis d’un ton bref et de mauvaise humeur, André reprit l’air d’importance et d’intelligence critique avec lequel il écoutait le discours du prédicateur.

Tandis que je cherchais à faire de nécessité vertu, et à reporter mon attention sur le sermon, je fus dérangé de nouveau par