Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 9, 1838.djvu/204

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politesse lui valut quelques avantages. D’abord elle ne lui coûtait rien, car je ne prenais jamais de tabac ; ensuite elle lui fournissait un excellent prétexte pour laisser reposer sa bêche quelques minutes, car il aimait assez à interrompre son travail ; mais, surtout, ces courtes entrevues lui donnaient occasion de débiter les nouvelles qu’il avait réunies, ou les remarques satiriques qu’inspire à un habitant du nord son humeur caustique.

« Je vous apprendrai, monsieur, » me dit-il un soir avec un air qui annonçait quelque nouvelle, « que j’ai été au Trinlay-Knowe.

— Bien, André, et je présume que vous avez appris quelque nouvelle au cabaret ?

— Je ne vais jamais au cabaret, monsieur… c’est-à-dire à moins qu’un voisin ne me régale d’une pinte de bière ou de quelque autre chose de pareil, car y aller à mes propres frais, ce serait perdre un temps précieux et un argent durement gagné. J’ai donc été au Trinlay-Knowe, comme je vous disais, pour une petite affaire à moi personnelle avec Mattie Simpson, qui a besoin d’une mesure ou deux de poires ; et il y en aura encore assez au château. Comme nous allions conclure le marché, arriva Pato Macready, le marchand voyageur.

— Le colporteur, voulez-vous dire ?

— Comme Votre Honneur voudra l’appeler. Ce n’en est pas moins un métier honorable et lucratif, et on l’a souvent exercé dans ma famille. Pate est mon arrière-cousin, et nous étions fort aises de nous revoir.

— Et vous avez vidé un pot de bière ensemble, je présume ? Au nom du ciel, abrégez.

— Patience, patience ; vous autres gens du midi vous êtes toujours pressés. Il y a là quelque chose qui vous regarde, donnez-moi le temps de vous le conter. Un pot de bière, disiez-vous ? Pate m’offrit de m’en payer un, mais Mattie nous donna une jatte de lait écrémé et un de ses gros pains d’avoine qui n’était pas plus sec et pas plus cuit qu’un morceau de gazon. Oh ! où sont nos bons gâteaux du nord cuits sur le gril ? Nous nous assîmes, et nous commençâmes à causer.

— Je vous en prie, dites-moi vos nouvelles, si vous en savez, car je ne peux pas rester toute la nuit ici.

— Alors, puisque vous le voulez, il y a du bruit à Londres ; ils sont tous clean wud, pour le coup qui s’est fait ici.