Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 8, 1838.djvu/209

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élevé si haut dans ces temps malheureux… Si je lui donnais le nom d’une émanation directe et immédiate de l’Animus mundi… c’est-à-dire d’un être que la nature a produit dans un instant d’orgueil, en cherchant à veiller, comme elle doit, à la conservation des créatures auxquelles elle a donné l’existence j’exprimerais à peine tout entière l’idée que je conçois de lui, protestant toujours que je ne dois nullement être regardé comme admettant, mais simplement comme supposant, pour la facilité du raisonnement, l’existence possible de ces espèces d’émanations, d’exhalaisons provenant de l’Animus mundi, dont j’ai parlé plus haut. J’en appelle à vous, colonel Desborough, qui êtes parent de Son Excellence… à vous, colonel Éverard, qui jouissez du précieux titre de son ami, ai-je trop fait valoir mon zèle pour Son Excellence ? »

Pour toute réponse Éverard s’inclina ; mais Desborough témoigna mieux encore son assentiment. « Oui, dit-il, j’en puis rendre témoignage. Je vous ai même vu jusqu’à attacher les lacets de son pourpoint à taillades, ou brosser son manteau, et bien d’autres choses encore… puis être traité avec tant d’ingratitude ! lui, vous retirer la belle occasion que vous aviez de… — Ce n’est pas pour cela, » dit Bletson, élevant gracieusement la main. « Vous me faites injure, maître Desborough… oui, bien sûr, mon cher monsieur… mais je sais que vous n’aviez pas mauvaise intention. Non, monsieur, ce n’est point la considération d’un intérêt privé qui m’a engagé à solliciter cette mission. Elle me fut conférée par le parlement d’Angleterre, au nom duquel commença cette guerre, et par le conseil d’état, dont les membres sont les conservateurs de la liberté anglaise. Mais la possibilité, la douce espérance de servir le pays, la confiance que j’en avais, moi… et vous aussi, maître Desborough… et vous aussi, digne général Harrison… tant je suis au dessus de toute considération personnelle ! et vous-même, j’en suis sûr, cher colonel Éverard, vous en seriez au dessus, si vous eussiez été de la commission, et plût au ciel qu’il en eût été ainsi !… Je disais donc que l’espérance de servir le pays, avec l’assistance de mes respectables collègues, de chacun et de tous ensemble… avec la vôtre aussi, colonel Éverard, en supposant que vous fussiez des nôtres… m’a porté à saisir cette occasion où je pouvais gratuitement, avec votre secours, messieurs, rendre de si importants services à notre chère mère la république d’Angleterre… Telle était mon espérance, ma foi, ma confiance, lorsqu’il nous arrive, de par le lord général, un ordre qui nous retire l’autorité en vertu de