Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 8, 1838.djvu/199

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tion de Woodstock bien connu et très probablement accepté par ceux que l’invasion des commissaires avait portés à prendre de si singulières mesures pour les chasser. Son esprit, disposé un instant à voir quelque chose de surnaturel dans ce tapage extraordinaire, se sentait disposé à expliquer la chose d’une manière plus raisonnable : ce n’était plus qu’un adroit complot, pour lequel un château comme Woodstock offrait tant de facilités.

Il jeta du bois dans le feu, ralluma la chandelle, et, examinant la position du pauvre Wildrake, le mit à son aise dans le fauteuil, autant que possible ; le Cavalier laissait aller ses membres comme un enfant. Son état contribua beaucoup à confirmer son patron dans l’idée que les troubles du château étaient des ruses combinées à dessein, car les esprits n’ont pas coutume de droguer les gens avec de l’opium. Il se jeta sur son lit, et pendant qu’il réfléchissait à ces bizarres événements, il entendit les sons d’une musique lente et douce, puis ensuite ces mots : « Bonne nuit, bonne nuit, bonne nuit ! » Ces mots trois fois répétés, et chaque fois sur un ton plus doux et plus éloigné, semblaient lui annoncer que les démons et lui étaient en trêve sinon en paix, et qu’il en serait débarrassé pour la nuit. Il eut à peine le courage de répondre « Bonne nuit ! » car, quoique bien convaincu de l’existence d’un complot, il était si bien exécuté, qu’il tremblait toujours, de même qu’un spectateur qui assiste à une scène tragique, qu’il sait n’être pas réelle, se sent cependant ému par la vraisemblance qu’elle renferme. Le sommeil s’empara de lui enfin, et ne le quitta qu’en plein jour le lendemain matin.


CHAPITRE XVI.

RÉCITS.


Puis brille celle clarté, avant-courrière de l’aurore, dont l’approche chasse vers le cimetière les ombres çà et là errantes.
Shakspeare. Rêve d’une nuit d’été.


Avec l’air frais du matin et le lever du soleil, toutes les impressions de la nuit précédente s’étaient effacées de l’esprit du colonel Éverard. Néanmoins il était toujours à se demander comment on s’y était pris pour opérer les sortilèges dont il avait été témoin. Il examina toute la chambre, sonda le plancher, la boiserie, la serrure, avec son pied et sa canne ; mais la porte, assurée par un énorme verrou, et de plus par une serrure, était aussi solide que quand il