Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 8, 1838.djvu/184

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ginaires. En cette occasion, il reprit un air de calme et d’aisance parfaite après la violente agitation à laquelle il venait de s’abandonner, ce qui montrait combien il désirait cacher ses véritables sentiments à Éverard, qui ne les eût pas sans doute partagés.

Il salua le colonel profondément et avec cérémonie, parla de la beauté de la nuit qui l’avait engagé à sortir de la Loge et à faire un tour de promenade dans le parc pour jouir d’un temps si agréable. Il prit ensuite Éverard par le bras, et se dirigea avec lui vers la Loge ; Wildrake et Tomkins suivaient de près par derrière et conduisaient les chevaux. Éverard, qui brûlait d’obtenir quelques renseignements sur ces mystérieuses aventures, s’efforça plus d’une fois de ramener Harrison sur ce sujet par quelques questions, mais le général (car les fous ne sont pas toujours bien disposés à s’entretenir de leur erreur mentale) parait toutes les attaques avec habileté, ou demandait du secours à son secrétaire Tomkins, qui était habitué à défendre son maître en toute occasion, ce qui lui avait valu, selon Desborough, l’ingénieux sobriquet de Fibbet.

« Et pourquoi avez-vous tiré l’épée, mon digne général, lui demandait Éverard, lorsque vous faisiez réellement par plaisir une promenade du soir ? — Vraiment, cher colonel, nous vivons dans un temps où il faut veiller les reins ceints, les mèches allumées, et les glaives nus. Le jour approche, croyez-moi ou ne me croyez pas, comme vous voudrez, où il faudra se tenir sur ses gardes pour ne pas se trouver nu et désarmé quand les sept trompettes sonneront : En bottes, en selles ; et que les flûtes de José joueront : À cheval et partez ! — C’est vrai, digne général ; mais il me semble que je vous ai vu faire des passes, tout à l’heure, comme si vous combattiez ? — J’ai une étrange manie, mon cher Éverard, quand je me promène seul et qu’il m’arrive, comme à présent, d’avoir mon épée à la main ; je m’amuse parfois, pour m’exercer, à porter des bottes contre des arbres. C’est un sot orgueil aux hommes de porter des armes. J’avais la réputation d’être excellent tireur, et j’ai obtenu des prix dans des assauts d’armes, avant d’être régénéré, avant d’être appelé à participer au grand ouvrage, lorsque j’entrai comme simple soldat dans le premier régiment de cavalerie de notre général victorieux. — Mais il me semble, dit Éverard, que j’ai entendu une lame se croiser avec la vôtre ? — Comment ! une épée se croiser avec la mienne ? Qui ce pouvait-il être, Tomkins ? — Ma foi, monsieur, c’était peut-être une branche d’arbre ; il y en a de toutes les espèces ici, et Votre Honneur peut avoir donné dans une bran-