Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 8, 1838.djvu/100

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blement porter ces dépêches à Cromwell en prenant bien garde toutefois de ne pas me laisser ravir mon paquet de loyauté, » dit-il en montrant la lettre du doigt ; « et je la remettrai entre les mains respectables de l’homme à qui elle est humblement adressée… Corbleu ! Mark, songes-y encore une fois… À coup sûr tu ne seras pas assez téméraire pour combattre sous les drapeaux de ce rebelle sanguinaire ?… Ordonne-moi de lui enfoncer trois pouces de mon poignard dans le ventre, et cette commission me plaira bien plus que de lui présenter ta lettre. — Va donc, répliqua Éverard ; il n’a été nullement question de cela dans le marché. Si tu veux me servir, rien de mieux ; sinon ne me fais pas perdre mon temps à disputer avec toi ; car chaque minute sera pour moi un siècle jusqu’au moment où cette lettre sera remise au général. C’est le seul parti qui me reste à prendre pour obtenir quelque protection et un asile pour mon oncle et sa fille. — Si c’est là ton affaire, dit le Cavalier, je n’épargnerai pas l’éperon. Mon cheval que j’ai laissé à la ville sera prêt à partir dais trois minutes, et tu peux compter que je serai près du vieux Noll… de ton général, je veux dire, en aussi peu de temps qu’il en faut à un homme pour galoper de Woodstock à Windsor ; car je trouverai, je pense, ton ami installé dans le palais où il a commis son meurtre. — Chut ! pas un mot de cela ! Depuis que nous nous sommes quittés la nuit dernière, je t’ai ouvert un chemin qu’il te sera plus facile de suivre que de prendre cet air mielleux, ces manières extérieures que tu possèdes si peu. J’ai averti le général des mauvais exemples que tu as constamment eus sous les yeux et de ta mauvaise éducation. — Ce qui doit signifier le contraire, j’espère, dit Wildrake ; car, à coup sûr, on m’a aussi bien élevé et aussi bien instruit qu’un jeune homme de Leicestershire pouvait le désirer. — Allons, paix ! je t’en prie… Entraîné quelque temps par le mauvais exemple, lui dis-je, tu as été malveillant et attaché au parti du roi déchu ; mais voyant les services que rendait le général à la nation, tu as fini par comprendre qu’il était envoyé par le ciel pour rendre la paix à ces royaumes déchirés. Ce compte que je lui rends de toi te fera, non seulement passer par dessus tes écarts, mais te donnera encore plus de crédit près de lui, comme si tu lui étais individuellement attaché. — Sans doute, dit Wildrake, comme tout pêcheur trouve toujours meilleur le poisson qu’il prend lui-même. — Il est probable, je pense, dit le colonel, qu’il te renverra ici avec des lettres qui me donneront le pouvoir d’arrêter les opérations de ces commissaires au séquestre, et accor-