Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 7, 1838.djvu/418

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sur une estimation raisonnable et en à-compte sur le paiement de votre mémoire. »

« Que le ciel le confonde ! dit sir Arthur n’étant plus maître de lui à cette preuve de condescendance. Son grand-père ferrait les chevaux de mon père, et cet impudent descendant d’un misérable forgeron voudrait m’escroquer les miens ! Mais je vais lui répondre comme il faut. »

Il s’assit donc, et se mit à écrire avec beaucoup de rapidité, puis s’arrêta et lut tout haut « Monsieur Gilbert Greenhorn, en réponse à deux lettres d’une date récente, j’ai reçu une lettre d’un individu qui dit s’appeler Grinderson, et qui s’annonce comme votre associé. Quand je m’adresse à quelqu’un, je n’ai pas l’habitude qu’on se serve d’un autre pour me répondre. Je crois avoir été utile à votre père, et que vous m’avez toujours trouvé obligeant et poli ; j’ai donc lieu de m’étonner… » — Et pourtant, dit-il en s’arrêtant tout court, pourquoi m’étonnerais-je de ceci et de toute autre chose, et à quoi bon perdre mon temps à écrire à un pareil drôle ? Je ne resterai pas toujours en prison peut-être ; et quand j’en sortirai, la première chose que je ferai sera de rompre les os à ce fat.

— En prison, monsieur ! dit miss Wardour d’une voix éteinte.

— Sans doute en prison, en pouvez-vous douter ? Ou vous ne comprenez pas la belle lettre de M. le procureur, ou vous avez peut-être 1000 et je ne sais combien de 100 livres et de schellings et de sols sterling à me donner pour satisfaire à ladite réclamation, pour parler son langage ?

— Moi, monsieur ! plût au ciel que j’en eusse les moyens ! Mais où est mon frère ? pourquoi ne vient-il pas depuis qu’il est en Écosse ? il aurait pu faire quelque chose pour nous aider.

— Qui ? Reginald ? il est allé, je suppose, avec M. Greenhorn, ou quelque illustre personnage de ce genre, aux courses de Lamberton. Il y a plus d’une semaine que je l’attends. Mais dois-je m’étonner que mes enfans me négligent comme le reste du monde ! Pardon, mon amour, ce n’est pas à vous que je devrais parler ainsi, à vous qui ne m’avez négligé, ni offensé de votre vie ! »

En parlant ainsi il baisa tendrement la joue de sa fille qui lui avait passé les bras autour du cou et le pressait affectueusement ; il se livra à cette consolation qu’apporte toujours au cœur d’un père, quelques chagrins qui puissent l’accabler, la douce conviction qu’il possède toute la tendresse de son enfant.

Miss Wardour profita de ce retour de sensibilité pour essayer