Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 7, 1838.djvu/271

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ma part. Je suis là à attendre impatiemment nos trésors ; nous devrions déjà en avoir rempli les deux besaces ; j’espère qu’elles sont assez grandes pour contenir toutes nos richesses ?

— Brenez garte, vieux rustre, dit le philosophe irrité ; si fous osez fous permettre encore une raillerie, brenez garte que je ne vous fende le crâne avec cette pêche !

— Et où seraient alors mes mains et mon bâton ferré ? répliqua Édie d’un ton qui n’indiquait aucune crainte. Non, non, monsieur Dousterswivel, je n’ai pas vécu si long-temps dans ce monde pour m’en laisser mettre à la porte de cette manière. Mais qui diable, mon camarade, vous met ainsi en colère contre vos amis ? Je gage que je vais trouver le trésor dans une minute, moi. » Et sautant dans la fosse, il reprit la bêche.

« Je fous chure, dit l’adepte, dont les soupçons étaient tout-à-fait éveillés, que, si fous afez eu l’audace de me chouer un bareil dour, vous me le baierez d’un manière terrible.

— Écoutez-le donc, dit Ochiltree ; il sait comment s’y prendre au moins pour faire trouver aux gens des trésors ! Parbleu ! cela me ferait croire que quelqu’un a déjà employé ce moyen-là avec lui. »

En entendant cette allusion très claire à la scène qui s’était passée entre sir Arthur et lui, le philosophe acheva de perdre toute patience, et, s’abandonnant à la violence naturelle de ses passions, leva le manche de la pioche cassée pour le faire retomber sur la tête du vieillard. Le coup, selon toute apparence, aurait été fatal si celui qu’il menaçait ne s’était écrié d’une voix mâle et ferme : « Honte à vous, méchant homme ! croyez-vous que le ciel et la terre vous laisseront assassiner un vieillard qui pourrait être votre père ? Regardez derrière vous. «

Dousterswivel se retourna machinalement, et vit, à son extrême surprise, une haute et sombre figure qui se tenait debout derrière lui. L’apparition, sans lui donner le temps d’avoir recours à l’exorcisme ou à la fuite, employa immédiatement les voies de fait et prit deux ou trois fois la mesure des épaules de l’adepte avec des coups si substantiels qu’il tomba et resta quelques minutes privé de sentiment, par suite de sa consternation et de sa terreur. Quand il revint à lui, il se trouva seul dans l’église ruinée, couché sur la terre molle et humide qui avait été retirée du tombeau de Misticol. Il se releva à demi avec une sensation confuse de colère, de douleur et d’effroi ; et ce ne fut qu’au bout de quelques minutes qu’il put arranger assez clairement ses idées pour se rappeler comment il était