Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 7, 1838.djvu/269

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

cette nuit ; et qui sait à quel point il serait content de notre intention de visiter ses trésors ?

Alle gute geister[1], murmura l’adepte, le reste de l’exorcisme étant rendu indistinct par le tremblement de sa voix… Je tois fous brier, monsier Édie, de ne bas barler ainsi, car d’abrès tout ce que ch’ai entendu l’autre nuit, j’ai raison de croire…

— Quant à moi, dit Édie en entrant dans la nef et agitant son bras en signe de défi et faisant claquer ses doigts, je ne me soucierais pas plus que de cela, de le voir paraître en ce moment ; car, après tout, c’est un esprit sans corps, tandis que nous sommes des esprits qui en avons un.

— Pour l’amour du ciel ! dit Doustesrwivel, ne barlez ainsi ni des esbrits ni des corps.

— Eh bien, dit le mendiant, voilà toujours la pierre ; et qu’il y ait un esprit ou non, je ne m’en mettrai pas moins à creuser un peu plus cette tombe. » Il sauta alors dans la fosse d’où l’on avait retiré le matin la précieuse cassette. Après avoir donné quelques coups de pioche, il feignit d’être fatigué, et dit à son compagnon : « Je suis vieux et faible maintenant, et je ne puis travailler long-temps de suite ; d’ailleurs il est juste que chacun ait son tour ; il faut que vous vous mettiez à ma place et que vous preniez la bêche pour enlever toute cette terre ; puis je reprendrai après vous. »

Dousterswivel prit donc la place du mendiant, et travailla avec le zèle que pouvait exciter dans une âme cupide, soupçonneuse et lâche comme la sienne, le puissant intérêt de l’avarice joint au désir ardent de terminer son entreprise, pour quitter le plus tôt possible un lieu qui lui inspirait tant d’effroi.

Édie, fort à son aise à côté du trou, se contentait d’exhorter son associé à travailler ferme. « Ma foi, peu de gens ont travaillé pour un si bon gage ; la boîte que nous espérons de trouver ne fût-elle que la dixième partie de la cassette n° 1, elle vaudrait encore le double, étant remplie d’or au lieu d’argent. Diable ! vous travaillez comme si vous aviez été élevé pour la pioche et la bêche ! savez-vous qui vous pourriez gagner par jour votre demi-couronne[2] toute ronde ! Prenez, garde à cette pierre, rangez vos pieds, » dit-il en poussant du pied une large pierre que l’adepte avait eu de la peine à soulever, et qu’Édie repoussa dans le trou sans pitié pour les jambes de son associé.

  1. Gute et geister, mots allemands qui signifient bon esprit. a. m.
  2. Trois francs de France. a. m.