Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 6, 1838.djvu/376

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daise : elle fit mal ses affaires ; j’embrassai la profession des armes, et je pense, jusqu’à présent, ne l’avoir pas déshonorée. — Vous êtes un bon et brave jeune homme, j’en réponds, dit Pleydell, et puisque vous avez été pendant si long-temps sans père, je voudrais, de tout mon cœur, pouvoir me donner ce titre. Mais cette affaire du jeune Hazlewood ?… — N’est qu’un fâcheux accident. Je voyageais en Écosse pour mon plaisir, et, après être resté une semaine chez mon ami Dinmont, avec lequel le hasard m’a fait faire connaissance… — Dites mon bonheur, reprit Dinmont. Deux brigands me brisaient le crâne, s’il n’eût été là… — Bref, je me rendais à Kippletringan, lorsque je fus dépouillé de mon bagage par des voleurs ; et je logeais en cette ville lorsque je rencontrai le jeune Hazlewood. Je m’approchais pour présenter mes respects à miss Mannering, que j’avais connue dans les Indes, et M. Hazlewood (mon équipage n’était pas des plus brillants) m’ordonna d’un ton impérieux de me retirer : de là naquit la querelle dans laquelle j’eus le malheur de lui causer involontairement une blessure… Maintenant, monsieur, que j’ai répondu à toutes vos questions… — Non, non, pas à toutes, » répondit Pleydell avec un clignement d’œil expressif ; « mais je remets la suite de l’interrogatoire à demain ; il est temps de clore la séance pour ce soir, ou plutôt pour ce matin. — Eh bien, monsieur, reprit le jeune homme, pour parler plus exactement, puisque j’ai répondu à toutes les questions que vous avez jugé convenable de m’adresser, serez-vous assez bon pour me dire qui vous êtes, vous qui prenez tant d’intérêt à mes affaires, et pour qui vous me prenez moi-même, puisque mon arrivée a occasionné tant de trouble ? — Moi, monsieur, je suis Paulus Pleydell, avocat du barreau écossais ; quant à vous, il n’est pas si aisé de dire précisément ce que vous êtes, pour le moment. Mais j’espère avant peu vous saluer du titre de Henri Bertram, esquire, représentant de l’une des plus anciennes familles d’Écosse, héritier par substitution du domaine d’Ellangowan… Oui, » ajouta-t-il, en fermant les yeux et en se parlant à lui-même, « il faudra sauter par dessus son père, et le faire déclarer héritier de son grand-père, l’auteur de la substitution… le seul homme raisonnable de la famille, dont j’aie entendu parler.

Tout le monde s’était levé pour aller se livrer au sommeil ; Mannering, se tournant vers Bertram que les paroles de M. Pleydell avaient rendu immobile d’étonnement, lui dit : « Je vous félicite de l’heureuse perspective que la fortune vous présente. J’ai été l’ami