Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 6, 1838.djvu/372

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L’avocat seul était dans son élément : de sang-froid, vif, plein d’activité, il voyait déjà en perspective un brillant succès dans un procès étrange, romanesque, mystérieux. Un jeune monarque, rempli d’espérance, à la tête d’une vaillante armée, n’éprouva jamais plus de contentement intérieur, au début de sa première campagne. Il s’agitait avec beaucoup d’énergie, et il prit sur lui le soin de toute l’explication.

« Allons, allons, messieurs, asseyez-vous. Cette affaire est de ma compétence. Permettez-moi de m’en mêler seul. Asseyez-vous, mon cher colonel, et laissez-moi faire. Asseyez-vous, M. Brown, aut quocumque alio nomine vocaris[1]. Dominie, en place. Prenez une chaise, brave Dinmont. — Je ne sais pas, monsieur Pleydell, » répondit Dinmont en regardant alternativement sa grosse redingote et le riche ameublement du salon, « si je ne serais pas plus à ma place quelque autre part, jusqu’à ce que vous me rappeliez… Je ne suis pas très bien équipé… »

Le colonel qui, en ce moment, reconnut Dinmont, alla à lui, et l’assura affectueusement qu’il était le bien-venu ; lui disant « qu’aux yeux de quiconque l’avait vu à Édimbourg, sa grosse redingote et ses bottes ferrées honoreraient le palais d’un roi. — Ah ! colonel, nous ne sommes qu’un simple paysan, mais nous apprendrons avec plaisir tout ce qui pourra arriver d’heureux au capitaine ; et nous sommes sûr que son affaire ira bien, si M. Pleydell s’en charge. — Vous avez raison, Dandie… vous parlez comme un oracle des Higlands[2]… Mais maintenant du silence… Bien ; vous voilà tous assis… Buvez un verre de vin, afin de commencer méthodiquement. Maintenant, ajouta-t-il en se tournant vers Bertram, mon cher enfant, savez-vous qui vous êtes ? »

En dépit de son inquiétude, Bertram ne put s’empêcher de sourire de ce singulier début ; il répondit : « En vérité, monsieur, je croyais le savoir, mais des événements récents me forcent d’en douter. — Dites-nous donc ce que vous pensiez être avant cette époque. — Je croyais être et me nommer Van Beest Brown, servant en qualité de cadet ou de volontaire sous le colonel Mannering, quand

  1. Ou quel que soit votre nom. a. m.
  2. Il ne sera pas inutile de remarquer, pour les lecteurs du sud, que la contrée montagneuse vers la limite du sud-ouest de l’Écosse se nomme Higland (la première syllabe se prononce brièvement), et que cette contrée ne doit pas être confondue avec les districts beaucoup plus étendus et plus montagneux au nord, qui se nomment aussi Higland (avec la première syllabe longue).