Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 6, 1838.djvu/293

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L’avocat calma ses craintes, lui demanda des nouvelles de Jenny Gibson, et apprit qu’elle avait accepté les offres de Dinmont. « Et moi, continua mistress Rébecca, j’en ai fait autant, puisqu’il a eu la politesse de m’inviter. Ce sont de très braves gens que les Dinmont, quoique ma maîtresse n’aimât pas beaucoup à parler de cette branche de la famille ; mais elle aimait on ne peut plus les jambons de Charlies-Hope, et les fromages, et les canards, et les mitaines, et les chaussons de laine d’agneau… oui, elle aimait bien tout cela. »

M. Pleydell congédia mistress Rébecca. Quand elle fut partie : « Je crois connaître la Bohémienne, dit-il. — J’allais vous en dire autant, répliqua Mannering. — Son nom ? — Meg Merrilies. — Comment savez-vous cela ? » dit l’avocat en regardant le militaire avec un air de surprise comique.

Mannering lui apprit qu’il avait vu cette femme à Ellangowan, il y avait une vingtaine d’années, et raconta à son savant ami toutes les particularités de sa première visite dans ce château.

M. Pleydell l’écouta avec une grande attention. « Je me félicitais, dit-il ensuite, d’avoir fait la connaissance d’un profond théologien dans la personne de votre chapelain ; mais je ne m’attendais pas à trouver dans son patron un disciple d’Albumazar ou de Messahala. J’ai l’idée pourtant que cette Bohémienne pourrait nous en dire, sur l’affaire qui nous occupe, plus long qu’elle n’en a appris par l’astrologie ou la seconde vue. Une fois déjà je l’ai eue entre les mains, mais je n’en pus pas tirer grand’chose. Je vais écrire à Mac-Morlan de remuer ciel et terre pour la découvrir. Je me ferai un plaisir d’aller dans le comté de… pour procéder moi-même à son interrogatoire… J’ai toujours une commission de juge de paix pour ce district, quoique je ne sois plus shérif… Je n’ai jamais rien eu tant à cœur en ma vie, que de savoir la vérité sur ce meurtre et sur le sort de cet enfant. J’écrirai au shérif du comté de Roxburgh, et à un juge de paix du Cumberland, homme très actif. — J’espère, quand vous viendrez dans notre comté, que vous établirez à Woodbourne votre quartier-général ? — N’en doutez pas ; je craignais que vous ne me le défendissiez… Mais déjeunons maintenant, ou j’arriverai trop tard. »

Le lendemain les nouveaux amis se séparèrent, et le colonel retourna dans sa famille sans aucune aventure qui mérite d’être rapportée.