Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 5, 1838.djvu/71

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vrier peut, à son club de six sous, puiser dans vingt feuilles contradictoires les nouvelles de la veille. La poste de la capitale n’arrivait qu’une fois par semaine à Waverley-Honour, et n’y apportait qu’une gazette hebdomadaire qui, après avoir satisfait la curiosité de sir Éverard, de sa sœur et du vieux sommelier, passait ensuite du château au rectorat, à la ferme habitée par le squire Strubbs, à la jolie maison blanche qu’avait dans les bruyères l’intendant du baronnet ; de là à la maison du bailli, et à un cercle nombreux de matrones et de campagnards aux mains dures et calleuses, si bien qu’au bout d’un mois de circulation, le journal était presque toujours mis en pièces.

Cette lenteur de nouvelles en cette circonstance fut avantageuse à Richard Waverley ; car si sir Éverard eût appris en même temps tous les méfaits dont son frère s’était rendu coupable, nul doute que le nouveau fonctionnaire n’aurait guère eu à se féliciter du succès de sa politique. Le baronnet, quoique le plus doux des êtres, avait dans le cœur des cordes sensibles que la conduite de son frère irrita vivement. Le domaine de Waverley ne portait aucune substitution, car il n’était jamais entré dans la tête d’aucun des premiers propriétaires qu’un jour un de leurs descendants se rendrait coupable des horreurs que la Lettre de Dyer attribuait à Richard. Même dans ce cas, le mariage du possesseur actuel pouvait devenir funeste aux intérêts de l’héritier collatéral. Ces différentes idées flottèrent long-temps dans le cerveau de sir Éverard, sans toutefois amener une détermination,

Il examina son arbre généalogique qui, couvert d’écussons et de signes emblématiques d’honneur et de gloire, pendait à la boiserie reluisante de la grande salle. Les descendants les plus proches de sir Hildebrand Waverley, à défaut de ceux de son fils aîné Wilfred, dont sir Éverard et son frère étaient les seuls représentants, se trouvaient être, comme il le vit sur les honorables archives, et comme il le savait fort bien lui-même, les Waverley de Highley-Park, comté de Hauts, avec lesquels la branche principale, ou plutôt la souche de la famille, avait cessé d’entretenir toute espèce de relation depuis le grand procès de 1670. Cette branche dégénérée des Waverley avait commis en outre une grande faute à l’égard du chef et de la source de leur noblesse,