Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 5, 1838.djvu/437

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Telle était la teneur de cet article, bien fait pour désoler notre héros… « Bon Dieu ! s’écria-t-il, suis-je donc un parricide ?… c’est impossible. Mon père, qui ne m’a jamais témoigné l’affection d’un père, tant qu’il a vécu, ne peut avoir été si affligé de la fausse nouvelle de ma mort, que cela ait causé la sienne ; non : je ne puis le croire… Ce serait une folie de se livrer un seul moment à de si horribles idées. Mais ce qui serait, s’il se peut, plus coupable qu’un parricide, ce serait de laisser en péril mon noble et généreux oncle, qui a toujours été pour moi plus qu’un père, s’il m’est possible de le sauver par quelque sacrifice que ce soit. »

Pendant que ces réflexions, aussi douloureuses que les piqûres du scorpion, pénétraient dans la tête de Waverley, le ministre interrompit une longue dissertation sur la bataille de Falkirk, étonné de la pâleur qu’elles avaient répandue sur le visage de son auditeur, et lui demanda s’il était indisposé. Par bonheur la mariée, la figure rayonnante de joie, entra en riant dans la chambre. Mistriss Williams était une femme douée d’une grande pénétration et d’un bon cœur : et devinant à l’instant même qu’Édouard avait trouvé dans ces gazettes des nouvelles affligeantes, elle intervint si à propos, que, sans exciter les soupçons, elle détourna l’attention de M. Twigtythe, et trouva moyen de l’occuper jusqu’au moment où il s’en alla ; ce qu’il ne tarda pas à faire. Waverley expliqua alors à ses amis qu’il se trouvait dans la nécessité de se rendre à Londres dans le plus court délai possible.

Cependant un motif de retard se présenta, auquel notre héros n’était pas accoutumé. Sa bourse, très-bien garnie quand il était parti pour Tully-Veolan, n’avait reçu depuis aucun renfort ; et, quoique la vie qu’il avait menée depuis cette époque ne fût pas de nature à l’entraîner à de grandes dépenses, s’étant toujours trouvé ou chez ses amis, ou à l’armée, cependant il s’aperçut qu’après avoir réglé ses comptes avec son hôte il ne lui restait plus de quoi prendre la poste. Le mieux lui parut donc d’aller joindre la grande route du nord à Borough-Brigde, et là, de prendre une place dans la grande diligence du nord, espèce de fort carrosse dans le goût antique, attelé de trois chevaux, qui faisait le voyage d’Édimbourg à Londres (avec l’aide de Dieu, comme le disait l’affiche) en trois semaines. Notre héros se sépara donc, après de tendres adieux, de ses amis du Cumberland, leur promettant de n’oublier jamais leur bonté, et espérant en