Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 5, 1838.djvu/434

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avancés dans la plaine n’avaient pu regagner leurs retranchements. Il chercha inutilement parmi les morts le corps de Fergus. Sur une petite éminence, à quelque distance de ses compagnons, étaient étendus trois dragons anglais, deux chevaux et Callum, Beg, dont le crâne, si dur qu’il fût, avait été fendu par le sabre d’un cavalier anglais. Il était possible que le corps de Fergus eût été emporté par son clan ; il était possible aussi qu’il se fût sauvé, d’autant plus qu’Evan Dhu, qui n’abandonnait jamais son chef, ne se trouvait pas au nombre des morts ; peut-être aussi était-il prisonnier, et le moindre des malheurs annoncés par l’apparition du Bodach Glas pouvait s’être réalisé. L’arrivée d’une troupe de dragons, pour forcer les passants d’ensevelir les morts, et de plusieurs campagnards qu’ils avaient déjà rassemblés à cet effet, obligea Édouard de rejoindre son guide, qui l’attendait avec anxiété dans une allée du parc.

Ils s’éloignèrent de ce champ de carnage, et arrivèrent heureusement au but de leur voyage. Chez le fermier Williams on fit passer Édouard pour un jeune parent qui avait étudié pour entrer dans le ministère ecclésiastique, et qui s’était retiré à la ferme jusqu’à ce que les troubles civils fussent terminés et qu’il pût continuer paisiblement ses études. Cette explication suffit aux bons et simples paysans du Cumberland ; d’ailleurs l’état supposé d’Édouard était en parfaite harmonie avec la gravité de ses manières et la vie solitaire et retirée qu’il menait. Cette précaution se trouva plus nécessaire qu’Édouard ne l’avait cru d’abord, une succession d’événements imprévus ayant prolongé son séjour à la ferme de Fasthwaite.

La neige, qui tomba avec abondance, rendit pendant dix jours son départ impossible. Quand les chemins commencèrent à devenir praticables, on apprit successivement que le Chevalier s’était retiré en Écosse, ensuite qu’il avait abandonné les frontières pour continuer son mouvement rétrograde sur Glasgow, et que le duc de Cumberland avait formé le siège de Carlisle : son armée fermait donc à Édouard le chemin de l’Écosse de ce côté. Sur les frontières de l’est, le maréchal Wade s’avançait vers Édimbourg et tout le long de la frontière, à la tête de forces considérables des corps de troupes réglées, des volontaires, des paysans armés, étaient en campagne pour étouffer la rébellion, et arrêter les traîneurs ou les corps détachés que l’armée jacobite, dans sa retraite précipitée, avait laissés derrière elle en Angleterre. La