Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 5, 1838.djvu/38

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voyant leurs prophéties non réalisées à la bataille de Dunbar, leurs séditieux prédicateurs obligèrent le prudent Lesley à marcher contre les Philistins dans Gilgal. »

Le vicaire jeta un regard scrutateur et fort peu civil sur cet interlocuteur, qui était un jeune homme de petite taille, à l’air modeste et réservé. Des études sérieuses et précoces avaient éteint dans ses traits la gaieté particulière à son âge, et leur avaient imprimé une teinte prématurée de méditation. Son œil avait cependant conservé tout son feu, et ses gestes toute leur vivacité. S’il eût gardé le silence, un long espace de temps se fût écoulé avant qu’on le remarquât ; mais, quand il parla, il y eut dans ses manières quelque chose qui attira l’attention.

« Quel est ce jeune homme ? » dit le vicaire à voix basse à son voisin.

« C’est, répondit-on, un Écossais appelé Maxwell, qui est venu rendre visite à sir Henri. »

« Je le jugeais tel, d’après son accent et ses manières, » dit le vicaire.

On fera observer ici que les Anglais du nord conservent, plus que leurs compatriotes du sud, l’ancienne aversion héréditaire contre leurs voisins les Écossais. Quelques autres personnes prirent part à la conversation, et soutinrent leur opinion avec tout le feu, toute la véhémence qu’inspirent ordinairement le vin et les discussions politiques. Cette circonstance rendit la réunion au salon fort agréable à la partie la plus sobre de la compagnie.

La société se dispersa peu à peu, et enfin le vicaire et le jeune Écossais restèrent seuls avec le baronnet, sa dame, ses filles et moi-même. L’ecclésiastique n’avait pas oublié, comme on le pense, l’observation qui le rangeait au nombre des faux prophètes de Dunbar, car il s’adressa à M. Maxwell à la première occasion qui se présenta.

« Hem ! c’est vous, monsieur, qui avez émis une réflexion sur les guerres civiles du dernier siècle ? Il faut en vérité que vous ayez des connaissances bien profondes sur ce sujet pour établir un parallèle entre ces guerres et les jours malheureux qui pèsent sur nous, jours bien certainement les plus sombres qui aient obscurci l’horizon de la Bretagne. » — « Dieu me préserve, docteur, d’établir une comparaison entre les temps présents et ceux que vous mentionnez. Je sais trop bien apprécier les avantages que nous avons sur nos ancêtres. Les factions et l’ambition ont