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CHAPITRE XLVIII.

EMBARRAS IMPRÉVU.


Quand la bataille fut terminée et toute chose mise en ordre, le baron de Bradwardine, après avoir vaillamment fait son devoir tout le jour, assigné aux soldats qu’il commandait leurs postes respectifs, pensa au chef de Glennaquoich et à son ami Waverley. Il trouva le premier occupé du soin d’apaiser les disputes de ses vassaux, relatives à des points d’honneur ou à des prouesses, et décidant de hautes et difficiles questions au sujet du butin. La plus importante de ces discussions concernait une montre d’or qui avait appartenu à quelque malheureux officier anglais. La partie contre laquelle le jugement fut rendu s’en consola, en remarquant qu’elle (la montre, qu’il prenait pour un animal vivant) était morte la nuit où Vich-Jan-Vohr l’avait donnée à Murdoch : de fait, elle s’était arrêtée faute d’être montée.

Ce fut au moment même où cette grande question venait d’être décidée, que le baron de Bradwardine, avec un air de mystère, et pourtant d’importance, rejoignit les deux jeunes guerriers. Il descendit de son cheval de bataille, qui était tout couvert de sueur, et recommanda à un de ses domestiques d’en prendre grand soin. « Je punis rarement, l’ami, dit-il au domestique ; mais si vous faites quelque tour de votre métier, et ne pansez pas mon pauvre Berwick comme il faut, pour courir au butin, le diable m’enlève si je ne vous casse pas la tête. » Il caressa alors avec complaisance l’animal qui l’avait porté à travers les périls de la journée, en lui disant un adieu cordial. « Eh bien ! mes chers et jeunes amis, continua-t-il, la victoire est glorieuse et décisive ; mais ces coquins d’Anglais ont tout d’abord pris la fuite. J’aurais eu grand plaisir à vous montrer les détails du prœlium equestre, du combat équestre que leur lâcheté a remis à demain, et qui est à coup sûr l’orgueil et la terreur du métier. Après tout, j’ai en-

    efforts de plusieurs officiers étaient parvenus à les arrêter un moment. S’apercevant alors qu’ils étaient poursuivis par un seul homme et deux domestiques, ils se tournèrent contre lui, et le taillèrent en pièces avec leurs sabres. Je me rappelle, étant enfant, de m’être assis sur son tombeau, que l’herbe longue et touffue distinguait du reste de la prairie. Une femme de la famille qui habitait alors à Saint-Clement’s-Wells avait coutume de me raconter l’événement tragique dont elle avait été témoin oculaire, et à l’appui elle me montrait une agrafe de la veste de cet infortuné gentilhomme.