Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 5, 1838.djvu/318

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partisan, et présenta Waverley aux seigneurs, aux chefs et aux officiers qui l’entouraient, comme un jeune gentilhomme de mérite et de grande espérance, dont l’enthousiame et le dévouement à sa cause leur donnaient une preuve des dispositions des familles illustres d’Angleterre dans cette crise importante[1]. En effet, c’était une question dont doutaient fort les partisans des Stuarts ; et si une défiance bien fondée dans la coopération des jacobites anglais éloignait encore de son étendard beaucoup de chefs illustres de l’Écosse, et diminuait le courage de ceux qui l’avaient déjà rejoint, il ne pouvait rien arriver de plus favorable au prétendant que la déclaration publique en sa faveur de la part d’un représentant de la famille des Waverley-Honour, si long-temps connus comme cavaliers et royalistes : c’est ce que Fergus avait prévu dès le commencement. Il aimait réellement Waverley, parce que leurs sentiments et leurs desseins ne s’étaient jamais contrariés ; il espérait le voir uni à Flora, et se félicitait de servir avec lui la même cause. Mais, comme nous l’avons dit, il se réjouissait aussi, en politique habile, que cette cause eût conquis un partisan si considérable, et il était loin d’être insensible à l’importance personnelle qu’il gagna auprès du prince pour l’avoir si puissamment secondé dans une telle conquête.

Charles-Édouard, de son côté, semblait désireux de montrer à sa cour l’estime qu’il portait à son nouvel ami ; il le mit donc aussitôt dans la confidence de toutes ses affaires. « Vous avez si long-temps vécu loin du monde, monsieur Waverley, pour des motifs qui me sont encore à peine connus, qu’il vous a sans doute été impossible de recueillir en quelques jours beaucoup de détails sur mes singulières aventures. Vous savez, pourtant, que j’ai débarqué dans le district éloigné de Moidart, avec une escorte de sept hommes, et que le loyal enthousiasme des chefs et de leurs clans a mis tout à coup un aventurier solitaire à la tête d’une vaillante armée. Vous devez aussi, je pense, avoir appris que le

  1. Les sentiments jacobites étaient généraux dans les comtés de l’ouest et dans la principauté de Galles. Mais, quoique les grandes familles de Wynnes, des Wyndhames, et d’autres, se fussent engagées à joindre le prince Charles, s’il pouvait débarquer, elles l’avaient fait à la condition qu’il serait appuyé par une armée française, sans laquelle elles jugeaient que l’entreprise était désespérée, sincèrement attachées à sa cause, et cherchant une occasion de le joindre, elles ne se crurent pas en honneur obligées de le faire, le prince n’étant soutenu que par un corps de sauvages montagnards parlant un dialecte inconnu et portant des vêtements bizarres. La marche vers Derby les frappa plutôt de crainte que d’admiration ; mais il était difficile de dire ce qu’il serait résulté si les batailles de Preston ou de Falkirk eussent été livrées et gagnées pendant que l’on marchait sur l’Angleterre.