Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 5, 1838.djvu/238

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dangers, il arriva à la cascade, et, comme Fergus l’avait prévu, il y trouva Flora. Elle était assise, et se leva pour aller au-devant de lui. Édouard essaya de commencer la conversation par quelques-uns de ces compliments, ou quelques-unes de ces phrases banales que l’usage autorise, mais ce fut sans succès. Flora avait d’abord paru éprouver le même embarras ; mais elle se remit plus promptement (présage peu favorable aux espérances de Waverley), et ce fut elle qui reprit la première le sujet de leur dernière entrevue. « Il m’est de la plus grande importance, monsieur Waverley, dit-elle, et sous tous les rapports possibles, de ne pas vous laisser le moindre doute sur mes sentiments. »

« Ne vous hâtez pas de les exprimer, dit Waverley fort agité ; s’ils sont tels que votre manière me le fait pressentir, je dois craindre de vous entendre. Mais permettez-moi d’espérer que le temps, ma conduite future et l’influence de votre frère… »

« Non, monsieur Waverley, dit Flora dont le teint s’était animé d’une légère rougeur, quoique sa voix restât ferme et calme ; je m’exposerais aux plus sévères reproches de ma conscience, si je différais d’un seul moment à vous déclarer la conviction intime où je suis que je ne pourrai jamais vous regarder autrement que comme un ami, un ami justement apprécié. Je vois que je vous afflige, et j’en souffre moi-même, mais il vaut mieux que ce soit maintenant que plus tard ; oh ! oui, monsieur Waverley, il vaut mieux mille fois que vous éprouviez à présent cette peine passagère, que les longs et flétrissants chagrins qui accompagnent une union inconsidérée et mal assortie. »

« Grand Dieu ! s’écria Waverley, et comment pourriez-vous prévoir qu’ils seraient la conséquence d’une union où la naissance est égale, que la fortune favorise, dans laquelle, si j’ose le dire, il y a rapport de goûts, lorsque vous déclarez n’avoir aucune préférence pour un autre, et que vous daignez même exprimer une opinion favorable de celui que vous rejetez ? » — « Oui, monsieur Waverley, je l’éprouve cette opinion favorable, et à un tel point que, quoique j’eusse préféré garder le silence sur les motifs de ma résolution, je suis prête à vous les découvrir, si vous exigez cette marque de mon estime et de ma confiance. »

Elle s’assit sur un fragment de roc, et Waverley se plaçant auprès d’elle, la supplia de lui accorder l’explication qu’elle venait de lui promettre.

« J’ose à peine, dit-elle, vous faire connaître mes sentiments,