Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 5, 1838.djvu/164

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Après avoir parcouru une certaine étendue de chemin sans lui adresser un seul mot, il ne put s’empêcher de lui dire : « Arriverons-nous bientôt ? »

« La caverne est à trois ou quatre milles, répondit le Highlandais ; mais comme le Duinhe Wassel est un peu fatigué, Donald pourra envoyer… il enverra un curragh. »

Cela n’apprenait pas grand’chose à Waverley. Qu’est-ce que que ce curragh qu’on lui promettait ? un homme ? un cheval ? une charrette ? une chaise de poste ? et l’homme à la hache d’armes ne fit d’autre réponse aux questions qu’il réitéra, que : « Oui, oui, curragh. »

Mais bientôt Édouard commença à le comprendre, quand, à la sortie du bois, ils se trouvèrent sur le bord d’une large rivière ou d’un lac, et lorsque son guide lui donna à entendre qu’il fallait s’asseoir pour attendre quelque temps. La lune, qui se levait, lui fit voir l’étendue d’eau qu’il avait devant lui, et les formes vagues et confuses des montagnes qui paraissaient l’environner. Le repos et l’air pur et frais d’une nuit d’été remirent un peu de la fatigue de son pénible voyage Waverley, qui respirait avec délices les parfums des fleurs du bouleau[1] baignées de la rosée du soir.

Il eut alors le temps de livrer ses pensées au romanesque de sa position. Il était là, sur les bords d’un lac qui lui était inconnu, n’ayant pour compagnon qu’un sauvage montagnard dont il ne connaissait pas la langue ; et il allait visiter la caverne de quelque brigand fameux, un autre Robin Hood, peut-être un Adam de Gordon ; on était au milieu de la nuit ; il avait voyagé avec danger et fatigue, avait été séparé de son domestique et abandonné par son guide : que de circonstances propres à faire travailler une imagination romanesque, sans compter que sa position devait lui paraître incertaine sinon périlleuse ! Ce qui contrastait désagréablement avec le reste, c’était la cause de son voyage, les vaches du baron : aussi rejetait-il cet incident peu noble sur le dernier plan du tableau.

Tandis qu’il se livrait à ses rêveries, son compagnon lui frappa doucement sur l’épaule, et lui montrant du doigt un endroit devant eux au-delà du lac, lui dit : « Voilà la caverne. »

Une légère clarté parut au loin dans cette direction, elle s’ac-

  1. Ce n’est pas le bouleau formant l’espèce la plus commune des montagnes d’Écosse, mais ce bouleau à larges feuilles des basses terres, qui exhale une odeur très-agréable. a. m.