Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 5, 1838.djvu/161

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— « Oui, avec sa queue, ou sa suite, quand il visite quelqu’un de son rang. Il y a, continua-t-il en l’arrêtant et se dessinant fièrement tandis qu’il comptait avec ses doigts les divers officiers de la maison de Mac-Ivor ; il y a son hanchman, ou homme de sa droite ; et puis son barde ou poète ; et puis son bladier ou orateur pour haranguer les grands personnages qu’il visite ; et puis son Gillymore, ou écuyer chargé de porter les armes, l’épée, la targe et le fusil ; et puis son Gilly-casfliuch, qui le porte sur son dos lorsqu’il faut traverser les ruisseaux et les petites rivières ; et puis son Gilly-coomstrain, qui mène son cheval par la bride dans les chemins escarpés et difficiles ; et puis son Gilly-trussharnish, pour porter son havresac ; et puis le joueur de cornemuse, et le domestique du joueur de cornemuse, et puis une douzaine de jeunes gens qui n’ont autre chose à faire qu’à suivre le laird, et à se tenir toujours prêts à exécuter les moindres ordres de son honneur. »

« Est-ce que votre chef entretient ordinairement tous ces gens-là ? » demanda Waverley.

« Oui, tous, répondit Evan, et beaucoup d’autres qui ne sauraient où se coucher sans la vaste grange de Glennaquoich. »

Evan Dhu, pour faire paraître la route moins longue à Waverley, continua à l’entretenir de la grandeur de son chef dans la paix et dans la guerre, jusqu’à ce qu’ils fussent au pied de ces montagnes qu’Édouard n’avait encore vues que de loin. Ils entrèrent vers le soir dans un de ces défilés effrayants qui communiquent des hautes aux basses terres ; le sentier, extrêmement roide et raboteux, tournait entre deux roches imposantes, et suivait le lit qu’un torrent écumeux, qui grondait au-dessous, paraissait s’être creusé depuis des siècles. Quelques obliques rayons du soleil couchant éclairaient la profondeur du torrent, et faisaient voir les rochers et les chutes d’eau dont il était semé. L’espace qui séparait le sentier du torrent formait un véritable précipice. On apercevait çà et là un quartier de granit, un arbre rabougri qui enfonçait ses racines tortues dans les fentes du rocher. À droite, la roche qui s’élevait au-dessus du sentier était aussi escarpée, aussi inaccessible ; mais à gauche, au-delà du torrent, la pente était couverte d’un bois taillis où s’entremêlaient quelques pins.

« C’est ici, dit Evan, le défilé de Bally-Brough, où, dans les anciens temps, dix montagnards du clan de Donnochie tinrent contre cent hommes des basses terres. On peut voir encore les