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vieille bibliothèque. Je ne saurais mieux décrire l’usage vague et extravagant que je fis de cet avantage, qu’en renvoyant mon lecteur aux études inconstantes de Waverley dans une situation pareille ; les passages concernant l’ordre de ses lectures sont puisés dans mes propres souvenirs. Ou doit concevoir que la ressemblance entre mon héros et moi ne s’étend pas plus loin.

Le temps, dans son cours, me prodigua les bienfaits d’une santé plus robuste, et une force musculaire telle qu’on ne pouvait ni l’attendre, ni l’espérer. Les études sérieuses, nécessaires pour me rendre propre à la profession à laquelle on me destinait, occupèrent la plus grande partie de mon temps ; et la société de mes amis et de mes compagnons, qui, comme moi, étaient sur le point de faire leur entrée dans le monde, remplit, par des amusements ordinaires à la jeunesse, l’intervalle qui devait s’écouler jusqu’à ce moment. J’étais dans une situation qui exigeait que je me livrasse à des travaux sérieux ; car, d’un côté, ne possédant aucun de ces avantages particuliers qui sont supposés favoriser un prompt avancement dans la profession des lois, et, d’un autre côté, ne rencontrant point d’obstacles extraordinaires qui pussent interrompre mes progrès, je pouvais raisonnablement espérer réussir selon le degré de peine plus ou moins grand que je prendrais, afin de me mettre en état de figurer au barreau.

Il est inutile d’expliquer dans ce précis comment le succès de quelques ballades eut pour effet de changer mes intentions et ma manière de voir, et de métamorphoser en littérateur un jeune avocat studieux, livré à l’étude des lois depuis quelques années. Il suffira de dire que j’avais embrassé la première de ces professions quelques années avant que je pensasse sérieusement à entreprendre un ouvrage d’imagination en prose, quoiqu’un ou deux de mes essais poétiques ne différassent des romans que parce qu’ils étaient écrits en vers. Cependant je ferai observer qu’à cette époque (hélas ! il y a trente années) je nourrissais l’ambitieux désir de composer un roman de chevalerie, qui devait être dans le style du Château d’Otrante, rempli d’incidents surnaturels, et où devaient figurer nombre de guerriers des frontières qui séparent l’Écosse de l’Angleterre. Ayant par hasard trouvé un chapitre de cet ouvrage projeté parmi de vieux papiers, je l’ai joint à cette préface[1] ; pensant que quelques lecteurs seraient curieux de lire les premiers essais de composition de pure fiction

  1. On trouvera le fragment précité à la suite de cette préface, sous le n° I. a. m.