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chant druidique.


À ma lyre j’ai dit : « Qui troubla tes accents ?
— C’est, dit-elle, celui dont se moquaient mes chants. »
La lame d’argent plie, et l’acier seul résiste.
La bonté perd courage, et la haine persiste.

Du miel le doux parfum flatte un moment nos sens,
De l’absinthe le goût se fait sentir long-temps.
L’agneau suit le boucher, sur les monts le loup veille ;
Quand la bonté s’endort, la vengeance s’éveille.

J’ai dit au fer : « Pourquoi brilles-tu plus long-temps
Sur l’enclume rougi, que le tison des champs ?
— Je viens, dit-il, d’un gouffre, et lui d’un frais bocage. »
La clémence est muette, et la vengeance outrage.

« Chêne, aux rameaux de cerf ressemblent tes rameaux.
— Hélas ! je périssais rongé des vermisseaux. »
La nuit l’enfant puni sait ouvrir la tourelle :
La bonté n’a qu’un jour, la haine est éternelle.

L’éclair détruit la flèche où la cloche sonnait ;
L’orage, les vaisseaux qu’un doux zéphyr berçait ;
Point de vaillant héros sans un fort adversaire ;
La bonté dure peu, la vengeance est colère.

Plusieurs autres descriptions sauvages y étaient mêlées, chacune ayant quelque analogie, quoique fantasque et éloignée, avec le sujet qui revenait comme un refrain à la fin de chaque stance ; de sorte que ce lai ressemblait à un morceau de musique qui, après des variations bizarres, revient toujours à la simple mélodie à laquelle on voulait joindre des ornements.

Tandis que le ménestrel chantait, ses yeux étaient fixés sur le pont et sur ce qui l’entourait ; mais quand il eut fini, regardant les portes éloignées de Garde-Douloureuse, il vit qu’elles étaient ouvertes, et que les gardes et les serviteurs se rassemblaient hors des barrières, comme pour partir pour quelque expédition, ou pour recevoir quelque haut personnage. En même temps, jetant les yeux autour de lui, il s’aperçut que les environs, si solitaires quand il s’était assis sur la pierre d’où il pouvait les contempler, se couvraient d’une foule considérable.

Pendant sa rêverie, plusieurs personnes, les unes seules, les autres en groupes, des hommes, des femmes et des enfants, avaient commencé à s’assembler sur les deux rives, et s’y promenaient tous en attendant quelque spectacle. Il y avait aussi beaucoup de rumeur du côté des moulins flamands, qui, quoique à une assez grande distance, étaient entièrement à la portée de