Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 4, 1838.djvu/273

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suggérer des motifs d’espérance et de consolation, quoique intérieurement elle n’en eût aucun.

Le chevalier blessé, le visage tourné de son côté, écouta ces fâcheuses nouvelles en homme qui n’en était affligé que parce qu’elles concernaient celle qui les lui apportait. Quand elle eut fini de parler, il resta comme plongé dans une profonde rêverie, les yeux tellement fixés sur elle, qu’elle se leva, dans l’intention de se retirer pour éviter des regards qui l’embarrassaient. Il se hâta alors de parler, afin de l’empêcher de sortir. « Tout ce que vous m’avez annoncé, noble dame, lui dit-il, eût suffi pour me briser le cœur, si tout autre que vous me l’eût appris ; car je vois que le pouvoir et l’honneur de ma maison, qui m’étaient si solennellement confiés, ont été flétris par suite de mes infortunes. Mais quand je vous regarde, et que j’entends votre voix ; j’oublie tout, sinon que vous êtes sauvée, et que vous êtes ici en toute sûreté. Laissez-moi donc vous supplier de me permettre de sortir de votre château et d’aller ailleurs. Je ne suis nullement digne de vos soins, puisque je n’ai plus les épées des autres à ma disposition, et que je suis incapable, pour le moment, de tirer la mienne.

— Si vous êtes assez généreux pour penser à moi-même dans votre infortune, noble chevalier, reprit Éveline, pouvez-vous supposer que j’oublie à quelle occasion ces blessures ont été faites ? Non, Damien, ne parlez pas de vous éloigner ; tant qu’une tourelle de Garde-Douloureuse restera debout, vous trouverez dans cette tourelle asile et protection. Tel serait, j’en suis sûre, le bon plaisir de votre oncle, s’il était ici. »

On aurait dit que Damien venait d’éprouver une douleur subite ; car, en répétant ces mots : « Mon oncle ! » il s’agita convulsivement et se détourna d’Éveline ; puis se calmant, il dit : « Hélas ! si mon oncle savait combien ses préceptes ont été mal suivis, au lieu de me recevoir dans cette maison il me ferait précipiter du haut des batteries.

— Ne craignez pas son déplaisir, » dit Éveline en se préparant encore à se retirer, « mais tâchez, en calmant votre esprit, de hâter votre guérison ; et alors, je n’en doute pas, vous pourrez rétablir le bon ordre dans la juridiction du connétable, même longtemps avant son retour. »

Elle rougit en prononçant ces derniers mots, et se hâta de sortir de l’appartement. Quand elle fut rentrée dans sa chambre, elle