Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 4, 1838.djvu/260

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sauvée, tout est bien. Mais le temps presse ; il faut que je parle sans retard : je ne devrais m’arrêter nulle part dans ce moment, encore moins dans ce château. Encore une fois, Amelot, faites-les monter à cheval.

— Non, monseigneur, dit Éveline, c’est impossible. Comme votre protégée, je ne puis laisser partir promptement mon protecteur ; comme médecin, je ne puis permettre à mon malade de compromettre sa vie. Il est impossible que vous supportiez la selle.

— Une litière, une bière, une charrette pour traîner le chevalier déshonoré et traître, cela serait encore trop bon pour moi ; un cercueil vaudrait mieux. Mais, aie soin, Amelot, qu’il soit fait comme celui du dernier valet ; pas d’éperons sur le drap mortuaire, pas d’écu portant les anciennes armoiries des de Lacy, pas de casque ni de cimier pour orner le char funèbre de celui dont le nom est déshonoré.

— A-t-il le délire ? » dit Éveline en regardant avec terreur et le blessé et le page, « ou ces paroles cachent-elles quelque mystère affreux ? S’il en est ainsi, parlez ; et si ma vie ou ma fortune peuvent y remédier, mon libérateur n’en souffrira pas. »

Amelot la regarda tristement, secoua la tête, et jeta les yeux sur son maître d’un air qui semblait exprimer que les questions qu’elle faisait ne pouvaient pas prudemment être satisfaites devant Damien. Lady Éveline l’ayant compris, se retira dans l’appartement voisin, et fit signe à Amelot de la suivre. Il obéit, après avoir jeté un regard sur son maître, qui restait dans la même attitude désolée, ses mains placées sur ses yeux, comme quelqu’un qui désire repousser la lumière et tout ce qu’elle rend visible.

Quand Amelot fut près d’elle, Éveline, faisant signe à sa suite de se retirer à l’extrémité de la chambre, le questionna sur le désespoir et les remords de Damien. « Tu sais, dit-elle, que je dois secourir ton maître, si je le puis, non-seulement par reconnaissance, comme m’ayant défendue au péril de sa vie, mais aussi par parenté. Dis-moi donc dans quelle situation il se trouve, que je puisse l’aider, si cela est en mon pouvoir ; c’est-à-dire (et ses joues pâles se colorèrent du plus vif incarnat) si la cause de sa douleur est telle que je puisse l’entendre. »

Le page salua profondément ; néanmoins il montra tant d’embarras quand il commença à parler, qu’il augmenta la confusion