Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 4, 1838.djvu/234

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Quand ces points importants furent terminés, la petite bande descendit le long de la rivière, regardant attentivement de tous côtés pour découvrir du gibier ; mais on ne voyait aucun héron dans les lieux fréquentés par cet oiseau, quoiqu’il y eût près de là une héronnière.

Dans les légers désappointements, il y en a peu d’aussi contrariants que celui du chasseur qui, après s’être mis en route avec tous les moyens nécessaires pour prendre du gibier, n’en rencontre pas, parce qu’avec tout son attirail de chasse et sa carnassière vide il se croit le sujet de la risée de tous les rustres qu’il rencontre. La société de lady Éveline éprouvait toute la mortification de ce désappointement.

« Joli pays que celui-ci, dit le marchand, où sur deux milles de terrain, le long d’une rivière, on ne peut trouver un pauvre héron !

— C’est le tapage que ces maudits Flamands font avec leurs moulins à eau et leurs moulins à foulon, dit Raoul ; ils détruisent les jeux et la bonne compagnie partout où ils arrivent. Mais si milady voulait venir environ un mille plus loin, jusqu’à l’étang Rouge, je pourrais vous montrer un gaillard à longues jambes qui ferait aller vos faucons jusqu’à ce que la tête leur tournât.

— L’étang Rouge ! dit Rose ; tu sais, Raoul, qu’il est à plus de trois milles au delà du pont, et qu’il se trouve dans les montagnes.

— Oui, oui, dit Raoul, voilà bien un autre tour flamand pour faire cesser la chasse ! Elles ne sont pas assez rares sur les Marches, ces Flamandes, pour avoir peur d’être pourchassées par des Gallois errants.

— Raoul a raison, Rose, dit Éveline ; il est absurde de rester renfermées comme des oiseaux dans une cage, quand tout autour de nous est si tranquille. Je suis décidée à franchir les barrières et à chasser comme autrefois, sans être entourés d’hommes d’armes comme des prisonniers d’État. Nous irons gaiement jusqu’à l’étang Rouge, jeune fille, et nous tuerons un héron comme les filles libres des Marches.

— Permettez-moi de dire à mon père, au moins, qu’il monte à cheval et qu’il nous suive, dit Rose ; » car elles étaient en ce moment près des manufactures rétablies du vigoureux Flamand.

« Comme tu voudras. Rose, dit Éveline ; mais, crois-moi, nous serons arrivés à l’étang Rouge et revenus au château avant que ton père ait passé son beau pourpoint, ceint son sabre à deux