Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 4, 1838.djvu/153

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de Baldringham avec une dignité aussi calme et aussi hautaine que celle de sa parente.

« Je viens vous souhaiter le bonjour, ma nièce, » dit Ermengarde avec hauteur ; cependant avec plus d’égard qu’elle ne semblait en avoir eu l’intention, tant le maintien d’Éveline lui en imposa ; « je vois qu’il vous a plu de changer la chambre qui vous avait été assignée conformément à une ancienne coutume de notre maison, pour habiter celle d’une domestique.

— En êtes-vous étonnée, madame, » demanda Éveline à son tour, « ou êtes-vous trompée dans votre attente en ne trouvant pas mon corps sans vie dans l’appartement que votre hospilalité et votre affection m’avaient fait préparer.

— Votre sommeil a donc été interrompu, » dit Ermengarde regardant fixement lady Éveline.

« Dès que je ne m’en plains pas, madame, le mal doit être considéré comme peu de chose ; ce qui est arrivé est passé, qu’il n’en soit plus question… mon intention n’est pas de vous importuner de ce récit.

— La dame au doigt sanglant n’aime pas le sang de l’étranger, » dit Ermengarde d’un ton de triomphe.

« Elle avait moins de sujet d’aimer celui des Saxons tant qu’elle fut sur la terre, dit Éveline, à moins que sa légende ne soit fausse sur ce point, et que votre maison, comme je le soupçonne fort, ne soit hantée, non par l’âme des morts qui ont souffert dans l’enceinte de ses murs, mais par ces esprits du mal que les descendants d’Hengist et d’Horsa servent, dit-on, encore en secret.

— Vous voulez plaisanter jeune fille, » dit Ermengarde avec dédain, ou si vous parlez sérieusement, le trait que vous avez lancé a manqué son but. Une maison qui reçut la bénédiction du bienheureux saint Dunstan et du saint roi confesseur n’est pas la demeure des esprits malins.

— La maison de Baldringham, reprit Éveline, ne peut être habitée par ceux qui redoutent ces mêmes esprits, et comme, avec humilité, je m’avoue du nombre, je vais dans un moment la laisser à la protection de saint Dunstan.

— Non pas avant d’avoir déjeuné, j’espère, dit lady Baldringham ; je me flatte que vous ne ferez pas une telle injure à mon âge et à la parenté qui nous unit.

— Pardonnez-moi, madame, répondit lady Éveline ; mais ceux qui ont éprouvé votre hospitalité pendant une nuit ne se sentent