Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 4, 1838.djvu/112

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gnons d’armes. Je me rendrai à sa tente comme à un saint pèlerinage ; j’irais même les pieds nus si un tel hommage pouvait lui plaire, dût le chemin être couvert d’épines et de pierres.

— Mon oncle sera honoré et charmé de votre résolution, madame ; mais il mettra ses soins à vous éviter une fatigue inutile, et dans cette vue un pavillon sera immédiatement élevé devant la porte du château, et là sera le lieu de l’entrevue tant désirée, s’il vous plaît de l’honorer de votre présence. »

Éveline consentit sans hésiter à ce que lui proposait Damien, désirant être agréable au noble de Lacy. Dans la simplicité de son cœur, elle ne voyait aucun motif plausible qui l’empêchât de traverser, sous la garde du jeune homme, et sans autre cérémonie, la plaine où, étant enfant, elle poursuivait les papillons et cueillait les fleurs des champs, et où, tout récemment encore, elle avait coutume d’exercer son palefroi ; car l’espace qui la séparait du camp du connétable avait peu d’étendue.

Le jeune chevalier, dont la présence alors lui était familière, retourna rendre compte à son parent et seigneur du succès de son message, et Éveline éprouva sur son sort le premier sentiment d’inquiétude qui eût agité son âme, depuis que la défaite et la mort de Gwenwyn lui avaient permis de consacrer exclusivement ses pensées au chagrin que lui avait causé la perte de son illustre père. Mais sa douleur, sans être apaisée, s’était affaiblie dans la solitude ; et maintenant qu’elle devait paraître devant un homme dont la renommée lui était si connue et qui venait de lui donner des preuves si récentes de sa puissante protection, son esprit se porta peu à peu sur la nature et les suites de cette importante entrevue. Sans doute elle avait vu Hugo de Lacy au célèbre tournoi de Chester, où sa valeur et son adresse étaient le sujet de tous les entretiens ; et en lui remettant le prix qu’avait remporté sa valeur, elle avait reçu de sa bouche, avec joie et orgueil, l’hommage dû à sa naissante beauté ; mais cependant elle n’avait de sa personne et de sa figure aucune idée précise ; si ce n’est qu’il était de taille moyenne, qu’il avait une armure d’une grande richesse, et qu’enfin, lorsqu’il avait levé la visière de son casque, il lui avait paru aussi âgé que son père. Cet homme, qu’elle ne se rappelait que si faiblement, avait été l’instrument choisi par sa divine protectrice pour la retirer de la captivité et pour venger la mort de son père ; elle se trouvait engagée par ses propres vœux à le considérer comme l’arbitre de sa