Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 27, 1838.djvu/32

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qu’ils voyaient avec jalousie les innovations de Malcolm et sa préférence pour les étrangers.

Le premier décret de Donald-Bane fut une sentence de bannissement contre tous ceux-ci ; tentative brutale pour ramener l’Écosse entière à l’état sauvage d’Argyle et des Hébrides. Il est rare toutefois que la civilisation, quand elle a fait déjà un peu de progrès, puisse être contrainte à rétrograder, sauf le cas où les connaissances marchent de front avec la corruption et la mollesse. Donald-Bane n’eut aucun triomphe durable. Duncan, bâtard du feu roi, rassembla une nombreuse armée d’Anglais et de Normands, repoussa Donald-Bane parmi les Jambes rouges[1], et s’empara du trône. Fut-ce pour son propre compte qu’il l’occupa ou comme régent de la légitime descendance de Malcolm ? on l’ignore. Après avoir tenu le sceptre, en propre ou par délégation, pendant une année, Edmond son beau-frère, le deuxième des enfants légitimes de Malcolm Cean-Morh, dont l’aîné avait embrassé la prêtrise, fit assassiner Duncan par un comte des Mearns, et rétablir Donald-Bane sur le trône en conséquence d’un traité par lequel il s’engageait à partager avec lui la royauté.

Donald-Bane, ainsi redevenu maître de la couronne, se remit à détruire tout ce qu’avait tenté son frère Malcolm, pour civiliser l’Écosse, et chassa de nouveau les étrangers hors de ses états. De là, nouvelle révolution. Edgard, troisième fils de Malcolm et de l’aimable Marguerite, que Guillaume-le-Roux favorisait, reçut des secours d’Angleterre, et parvenant à se saisir de la personne de son oncle Donald-Bane, l’emprisonna, puis lui creva les yeux. Edmond qui avait été l’auteur de cette seconde usurpation de Donald-Bane, fut aussi emprisonné, et en signe de repentir pour la participation qu’il avait prise à l’assassinat de Duncan, demanda, lorsqu’il mourut, que les fers qu’il avait portés dans son cachot fussent enterrés avec lui dans son cercueil. Edgard, malgré la cruauté qu’il montra envers son vieux oncle, paraît avoir eu le caractère équitable et humain. Il resta en paix avec l’Angleterre, et l’amitié des deux royaumes fut encore cimentée par le mariage de sa sœur Mathilde avec Henri Ier, dit Beauclerc. Edgard mourut après avoir régné dans un profond repos environ neuf ans.

Alexandre Ier lui succéda comme quatrième fils de Malcolm, et

  1. Red legs. On appelait ainsi les montagnards d’Écosse et les insulaires de l’ouest de cette contrée, parce qu’ils avaient les jambes entièrement nues. a. m.