Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 27, 1838.djvu/19

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souvent le théâtre d’affreux combats entre les Pictes et les Northumbriens, qui luttaient, les uns pour conserver, les autres pour reconquérir ces fertiles provinces.

Une lutte beaucoup plus importante que celle des Saxons et des Pictes se poursuivit entre ce dernier peuple et les Scots Irlandais qui, comme nous l’avons vu, habitaient le côté occidental de l’île, tandis que les Pictes en occupaient le côté oriental. Il était, à la vérité, de toute évidence, que, tant que ces deux vastes portions de la Grande-Bretagne du nord ne seraient pas réunies sous un seul gouvernement, il n’y aurait pas de sûreté possible pour le pays contre des envahisseurs étrangers. Après bien des batailles meurtrières, après beaucoup de sang répandu et une impitoyable dévastation des deux contrées, quelques mesures semblent avoir été prises pour qu’une paix durable s’établît entre ces nations rivales. Urgaria, sœur d’Angus, roi des Pictes, fut mariée à Aycha IV, roi des Scots, et leur fils Alpin, succédant à son père en cette qualité, régna heureusement de 833 à 836, dernière année pendant laquelle il fut tué en Galloway où l’avait attiré quelque contestation. Le trône des Pictes, ainsi devenu vacant faute d’héritier mâle, fut réclamé par Kenneth, fils et successeur d’Alpin, qui, comme descendant d’Urgaria, sœur d’Angus, fit triompher au moyen d’une armée ses droits à l’héritage. Wrad, dernier des monarques Pictes, mourut à Forteviot, en 842, tandis qu’il combattait pour sa capitale et son royaume ; alors les Pictes furent soumis. La tradition et les anciennes histoires s’accordent à représenter Kenneth, une fois victorieux, comme s’efforçant d’extirper toute la race des vaincus ; mais il faut voir là une exagération. Des auteurs plus modernes choqués de l’invraisemblance d’un tel fait, ont, pour adoucir la chose, supposé que, à la mort de Wrad, Kenneth s’empara du trône des Pictes par droit de succession, comme légitime héritier de son aïeule Urgaria. Par malheur, et c’est ce qui rend inadmissible cette correction historique, il n’est plus question dans l’histoire d’Écosse, à partir de la victoire de Kenneth Macalpin sur Wrad, ni de la nation Picte, ni d’un royaume de ce nom ; au contraire, le roi des Scots et ses sujets accaparent tout le territoire qui avant la conquête était occupé par les deux peuples. En un mot, la révolution doit avoir été si complète, que la langue même des Pictes est perdue et que le dialecte qu’ils parlaient forme un sujet de doute pour les antiquaires. Il était celtique, probablement, avec une forte teinte de gothique.