Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 26, 1838.djvu/544

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ton à une dame qui avait tant de bontés pour eux, de sorte qu’il y avait à peine dans les montagnes du voisinage un vallon avec lequel ils ne lui eussent fait faire connaissance.

Dans une de ces excursions, Reuben étant occupé d’une autre manière, Davie servait seul de guide à lady Staunton, et lui avait promis de lui montrer une cascade plus haute et plus majestueuse encore qu’aucune de celles qu’ils eussent encore vues. C’était une course de cinq grands milles et par un chemin difficile et raboteux qu’animaient cependant des points de vue variés ; tantôt on apercevait le sommet de quelque montagne, tantôt la mer et ses îles qui se montraient par intervalles, quelquefois des lacs lointains, des rochers ou des précipices. La cascade elle-même, lorsqu’ils y furent arrivés, les dédommagea amplement de la fatigue de la marche… Une masse d’eau considérable se précipitait d’un seul jet sur la surface d’un noir rocher qui contrastait fortement par sa couleur avec la blanche écume de la cascade ; et à la profondeur d’environ vingt pieds s’élevait un autre morceau de roc qui venait cacher le fond de l’abime où s’engloutissait le torrent. L’eau mugissante au-dessous battait les pieds du rocher qui interceptait ainsi la vue de sa chute, et couvrait d’un torrent d’écume ses flancs rocailleux. Ceux qui aiment réellement la nature veulent toujours pénétrer dans ses secrets les plus cachés, et lady Staunton demanda à Davie s’il n’y aurait pas quelque moyen de voir en entier le précipice dans lequel s’engouffrait la cascade. Il lui dit qu’il connaissait un point, sur l’extrémité la plus éloignée du rocher qui leur en interceptait la vue, d’où l’on découvrait la cataracte tout entière, mais que le chemin par lequel on y arrivait était escarpé, glissant et dangereux. Décidée cependant à satisfaire sa curiosité, elle pria Davie de l’y conduire, et celui-ci se mit en devoir de la guider à travers les rocailles, lui désignant avec précaution les endroits où elle pouvait poser le pied, car il ne s’agissait plus de marcher, mais de gravir.

Grimpant pour ainsi dire le long du rocher, semblables à des oiseaux de mer, ils réussirent à en faire le tour, et arrivèrent en face de la cascade, qui présentait dans cet endroit le spectacle le plus effrayant. Elle tombait en bouillonnant et avec un fracas épouvantable et continuel, semblable au bruit menaçant de la foudre, dans un noir abîme à plus de cent pieds au-dessous d’eux, et qui ressemblait au cratère d’un volcan. Le mugissement des eaux, leur chute précipitée qui remplissait l’air d’une vapeur hu-