Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 26, 1838.djvu/539

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avait résolu de prendre des renseignements plus exacts sur les aveux faits à Carlisle et sur le sort de leur malheureux enfant ; enfin que, à force de prières et sur la promesse de garder le plus sévère incognito, elle avait arraché plutôt qu’obtenu son consentement pour aller passer une semaine ou deux avec sa sœur ou dans son voisinage, tandis qu’il continuerait des recherches auxquelles il paraissait attacher un espoir dont elle-même n’osait pas se flatter.

Cette lettre était terminée par un post-scriptum : lady Staunton y priait Jeanie de lui abandonner le soin de toute cette affaire, et de consentir seulement aux arrangements qu’elle proposerait. Après avoir lu et relu cette lettre, mistress Butler s’empressa de descendre, partagée entre la crainte de trahir son secret et le désir de se jeter au cou de sa sœur. Effie la reçut avec un regard affectueux, mais qui en même temps semblait l’avertir d’être sur ses gardes, et la conversation commença sur-le-champ.

« Je disais à monsieur… au capitaine, mistress Butler, que si vous pouviez me donner une chambre chez vous, avec un lit pour Ellis et mes deux domestiques, je préférerais rester ici et ne point aller loger au château que Sa Grâce a bien voulu mettre à ma disposition. On m’a conseillé d’habiter le plus près des chèvres qu’il me serait possible. — J’ai assuré milady, mistress Butler, dit Duncan, que vous ne manqueriez pas de faire un bon accueil aux hôtes de Sa Grâce ou aux miens, mais qu’elle ferait beaucoup mieux d’habiter le château. Quant aux chèvres, elles peuvent y être amenées, car il est convenable que ce soit ces animaux qui se dérangent plutôt que milady. — Je ne veux pas qu’on dérange les chèvres pour moi, dit lady Staunton… Je suis sûre que le lait doit être bien meilleur ici… » Elle prononça ces paroles d’un air de langueur, de négligence, et du ton d’une femme habituée à se voir obéie au moindre signe, et dont les plus légers caprices n’ont jamais trouvé d’opposition.

Mistress Butler s’empressa de répondre qu’elle mettait toute sa maison à la disposition de lady Staunton ; mais le capitaine ne se rebuta pas.

« Le duc, dit-il, m’a écrit… — J’arrangerai tout cela avec Sa Grâce, repartit lady Staunton. — Et les bagages qui sont arrivés de Glasgow… ? — Tout ce qui m’est nécessaire peut être envoyé au presbytère… Je prie mistress Butler de vouloir bien me montrer l’appartement qu’elle me destine, et vous, capitaine,