Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 26, 1838.djvu/480

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tilité et l’excellence de la discussion publique ; car il est certain qu’un homme qui est sous l’influence d’une opinion particulière trouve beaucoup plus facile de se persuader la justice d’une mesure vers laquelle son inclination ou son intérêt le porte quand il la discute intérieurement, que quand il est obligé d’en soumettre le mérite à un tiers, devant qui la nécessité de paraître impartial le force à être beaucoup plus scrupuleux dans l’exposition de l’affaire qu’il ne le serait envers lui-même dans le silence de la réflexion. Après avoir fini tout ce qu’il avait à dire, Davie se crut enfin obligé de s’expliquer davantage sur les faits, et de déclarer que ce n’était pas un cas hypothétique dont il venait de parler, mais une affaire très-sérieuse sur laquelle, par suite de sa propre influence et de celle du duc, Reuben Butler serait bientôt appelé à décider.

Ce fut avec une espèce d’inquiétude que Davie Deans entendit Butler lui dire, en retour de cette communication, qu’il prendrait toute la nuit pour réfléchir sur ce qu’il venait de lui dire dans des intentions si amicales, et qu’il lui ferait réponse le lendemain matin. Dans cette occasion l’amour paternel l’emporta sur tout autre sentiment. Il pressa Butler de passer la soirée avec lui ; il mit sur la table, chose extraordinaire pour un homme si frugal, une bouteille et même deux d’une excellente ale double. Il parla de sa fille, de ses vertus, de son activité, de son industrie, de son ordre dans le ménage, de son cœur aimant et affectueux. Enfin il amena Butler à une déclaration si positive de ses sentiments pour Jeanie, qu’avant la chute du jour elle lui était promise, et que s’ils éprouvèrent quelques scrupules d’abréger le temps que celui-ci avait demandé pour faire ses réflexions, il sembla du moins bien entendu entre eux que, selon toute probabilité, Butler deviendrait ministre de Knocktarlity, pourvu que la congrégation fût aussi disposée à l’accepter pour pasteur que le duc à lui accorder ce bénéfice. Quant au serment, ils convinrent qu’il serait temps de s’en occuper si on venait à le lui demander.

Plusieurs arrangements furent adoptés dans le cours de la soirée, et confirmés par les relations qu’ils eurent avec l’homme d’affaires du duc, qui apprit à Deans et à Butler le désir qu’avait ce gracieux seigneur que leur réunion avec Jeanie, à son retour d’Angleterre, se fit à Roseneath, dans la maison même du duc.

Tels sont les événements relatifs aux paisibles amours de Jeanie Deans et de Reuben Butler, qui pouvaient servir à expliquer leur