Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 26, 1838.djvu/436

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monde dans de profondes ténèbres. Ainsi donc, et puisque je montre peut-être un peu trop d’attachement pour les choses mondaines, je reçois cette nouvelle épreuve au sujet d’Effie comme un avertissement de quitter le pays d’Haran, comme autrefois le juste Abraham, et de quitter les parents de mon père, la maison de ma mère, les cendres et la poussière de ceux qui se sont endormis avant moi, et qui attendaient d’être réunies à ces vieux os que je dois bientôt rendre à la terre. Et c’est une consolation pour mon cœur d’être obligé de prendre ce parti, quand je songe à la décadence du zèle religieux dans ce pays, aux nombreuses hérésies et aux apostasies de la nation, et combien les cœurs y sont devenus tièdes pour la vraie foi. Je suis fortifiée dans cette résolution de changer de contrée, en apprenant que les fermes se louent à un prix modéré dans le Northumberland, où il y a beaucoup de membres précieux de notre Église souffrante. Il ne sera pas difficile d’y transporter le bétail que je jugerai à propos de garder. J’ai pensé à aller du côté de Wooler ou dans les environs, ayant soin de me tenir toujours sur les revers d’une montagne… Quant au reste du troupeau, je ne serai pas en peine d’en tirer bon parti, Dieu nous faisant la grâce de savoir employer les biens de ce monde. Le laird s’est montré un véritable ami dans nos malheurs, et je lui ai rendu ce qu’il avait avancé dans l’affaire d’Effie, car M. Novit ne lui a rien remis de l’argent qu’il avait entre les mains, comme le laird et moi nous nous y attendions. Mais la justice dévore tout, comme on dit parmi le peuple. J’ai été obligé d’emprunter cet argent dans cinq ou six bourses, et M. Saddletree me conseillait de faire une sommation au laird de Lounsbeck pour qu’il me remboursât mille marcs qu’il me doit ; mais je ne suis pas admirateur des sommations, depuis ce terrible jour où une proclamation à son de trompe sur la place du marché d’Édimbourg a renversé de leurs chaires la moitié des plus fidèles ministres de l’Écosse. Cependant j’aurai recours à une adjudication, puisque d’après M. Saddletree c’est le terme qu’on emploie maintenant, et je ne perdrai pas de l’argent bien acquis, s’il est un moyen de l’empêcher.

Quant à la reine et à l’honneur qu’elle a fait à la fille d’un pauvre homme, et à la miséricorde que vous avez trouvée en elle, tout ce que je puis faire, c’est de prier constamment pour sa prospérité ici-bas et dans l’éternité, et pour l’établissement durable de sa maison sur le trône de ces royaumes à présent et à jamais. Je