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mêmes arguments : le bill fut graduellement dépouillé de ses clauses les plus rigoureuses et les plus vexatoires, et on finit en dernier lieu par imposer une amende à la ville d’Édimbourg en faveur de la veuve de Porteous, de sorte que, suivant l’observation que quelqu’un en fit dans le temps, tous ces débats si animés n’aboutirent qu’à faire la fortune d’une vieille cuisinière ; car la femme de Porteous avait exercé cette profession avant son mariage.

La cour cependant n’oublia pas l’affront qu’elle avait reçu dans cette affaire, et le duc d’Argyle, qui y avait si puissamment contribué, fut regardé quelque temps après comme un homme en disgrâce. Il était nécessaire de mettre ces circonstances sous les yeux du lecteur, parce qu’elles servent à lier les parties précédentes de notre histoire avec ce qui va suivre.

Le duc était seul dans son cabinet quand un de ses valets de chambre l’avertit qu’une jeune paysanne arrivant d’Écosse demandait à lui parler.

« Une paysanne arrivant d’Écosse ! qui peut amener à Londres la petite sotte… ? quelque amoureux enlevé pour le service de mer, ou quelques fonds perdus dans la compagnie de la mer du Sud, ou quelque autre affaire de ce genre, je suppose, qui ne peut être arrangée que par Mac-Callum More. La popularité a aussi ses inconvéniens… Cependant, Archibald, faites monter notre compatriote… il n’est pas honnête de la faire attendre. »

Archibald introduisit dans la bibliothèque une jeune femme d’une taille un peu au-dessous de la moyenne, et dont la physionomie pleine de modestie avait l’expression la plus agréable, quoique son teint un peu hâlé fût marqué de quelques taches de rousseur et qu’il n’y eût aucune régularité dans ses traits. Elle portait le plaid écossais ajusté de manière à couvrir en partie sa tête et à retomber en arrière sur ses épaules. Des cheveux blonds arrangés avec grâce et simplicité accompagnaient sa figure ronde et généralement animée du sourire de la bonne humeur, mais qui, dans ce moment, exprimait une crainte respectueuse que lui inspiraient sans doute le rang et l’importance du duc et la solennité de sa mission, mais sans aucun mélange de mauvaise honte ou d’embarras. Le reste du costume de Jeanie était semblable à celui des jeunes Écossaises de sa condition, mais arrangé avec ce soin et cette scrupuleuse propreté qui se trouve souvent unie à la pureté de cœur dont elle est l’emblème.