Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 24, 1838.djvu/93

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venant ou de cette modestie qui lui est échue à juste titre, comme servant à adoucir et orner ses autres qualités, ou de ce qu’avec raison il se méfie du talent de sa femme pour en faire l’éloge. — Nous allons donc faire rappeler Astarté, reprit l’impératrice ; elle ne peut encore avoir porté son offrande au cabinet d’Apollon. — Sous le bon plaisir de Votre Majesté impériale, répliqua Nicéphore, le dieu pythien pourrait s’irriter si l’on reprenait un dépôt dont lui seul peut convenablement estimer la valeur. Je suis venu ici pour communiquer à l’empereur des affaires d’état pressantes, et non pas pour tenir une conversation littéraire avec une compagnie qui, je suis forcé de le dire, est d’une nature un peu mélangée, puisque j’aperçois un simple garde du corps dans le cercle impérial. — Par la croix, mon gendre ! s’écria Alexis, vous faites tort à ce brave jeune homme : c’est le frère de ce brave Anglo-Danois qui nous assura la victoire à Laodicée, par sa valeureuse conduite et sa mort ; lui-même est cet Edmond… ou Édouard… ou Hereward, auquel nous sommes à jamais redevables d’avoir assuré le succès de cette victorieuse journée. Il a été appelé en notre présence, mon gendre, puisqu’il importe que vous le sachiez, pour rafraîchir la mémoire de mon Acolouthos, Achille Tatius, ainsi que la mienne, au sujet de quelques événements de la journée que nous avions un peu oubliés. — En vérité, sire, répondit Brienne, je suis au désespoir ! Je crains, en venant vous interrompre dans d’aussi importantes recherches, d’avoir en quelque sorte intercepté une portion de cette lumière qui doit éclairer les siècles futurs. Il me semble toutefois que, dans le récit d’une bataille livrée sous les ordres de Votre Majesté impériale et ceux de vos grands capitaines, votre témoignage pourrait fort bien rendre superflu celui d’un homme comme celui-ci… Dis-moi, » ajouta-t-il, se retournant avec hauteur du côté du Varangien, « quelle particularité peux-tu ajouter dont il ne soit pas fait mention dans la relation de la princesse. »

Le Varangien répliqua sur-le-champ : « Une seule, et la voilà ; lorsque nous fîmes halte à la fontaine, la musique que faisaient les dames de la maison de l’empereur, et particulièrement les deux que j’aperçois maintenant, était la plus délicieuse qui ait jamais frappé mes oreilles ! — Quoi ! oses-tu émettre une opinion si audacieuse ? s’écria Nicéphore. Appartient-il à un homme comme toi de supposer que la musique exécutée par la condescendance de la femme et de la fille de l’empereur était destinée à fournir matière à l’admiration ou à la critique de chaque barbare plébéien qui pouvait les en-