Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 24, 1838.djvu/329

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teindre en un instant…. comme cette lumière pâle et tremblante, dont le faible éclat ne ressemble que trop à la vie de ce malheureux malade. — Appelle donc, mon cher Douban, un ou deux des muets qui servent dans l’intérieur, et qui ont été souvent tes aides en des cas pareils… ou plutôt… Édouard, tes mouvements seront plus rapides. Va chercher ces muets… fais-leur prendre une espèce de litière pour transporter ce malade ; et toi, Douban, tu surveilleras tout. Fais-le porter font de suite dans un appartement convenable, pourvu qu’il soit secret ; ordonne qu’on le mette au bain, et tâche de ranimer ses faibles forces… et souviens-toi qu’il faut, s’il est possible, qu’il paraisse demain en public. — C’est un résultat difficile à obtenir, répondit Douban, après le régime et le traitement auxquels il a été tenu, comme ne l’indiquent que trop clairement les lentes pulsations de son pouls. — C’est une méprise du geôlier, monstre inhumain, qui en aurait été puni, si le ciel n’y eût déjà pourvu par l’intervention étrange d’un Sylvain, d’un homme des bois, qui a mis hier à mort ce geôlier au moment où il voulait faire périr son prisonnier… Oui, mon cher Douban, un soldat de nos gardes appelés les immortels a failli couper cette fleur de notre confiance, que nous avons été obligés de renfermer pour un temps en un lieu secret. Alors, il est vrai, un marteau grossier aurait mis en pièces un brillant sans pareil ; mais le destin nous a préservés d’un tel malheur. »

Après l’arrivée des muets, le médecin, qui semblait plus accoutumé à agir qu’à parler, fit préparer un bain avec des plantes médicinales, et déclara que le malade ne devait pas être troublé avant que le soleil du lendemain fût haut dans les cieux. Ursel fut donc mis dans le bain préparé suivant les instructions du médecin, mais sans donner aucun signe de vie. Il fut ensuite porté dans une belle chambre à coucher, donnant par une large croisée sur une des terrasses du palais, qui commandait une vue magnifique. Ces opérations furent exécutées sur un corps tellement affaibli par les souffrances, tellement mort aux sensations ordinaires de l’existence, que ce ne fut que lorsque la sensibilité revint peu à peu au moyen de frictions sur les membres engourdis, et d’autres moyens que le médecin espéra que les brouillards qui offusquaient l’intelligence du malade se dissiperaient enfin.

Douban se chargea volontiers d’obéir aux ordres de l’empereur et resta près du lit du malade jusqu’au jour, prêt à soutenir la nature autant que son habileté le lui permettait.