Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 24, 1838.djvu/262

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

son goût pour les amusements plus guerriers, goût qui affectait sensiblement son père, mais auquel sa mère, qui dans sa jeunesse avait eu elle-même de semblables caprices, donnait aisément sa sanction.

Cependant les captives furent traitées avec bienveillance, et Brenhilda devint fort attachée à la jeune Anglo-Saxonne, qu’elle aimait moins pour sa supériorité dans les arts d’agrément que pour son activité dans les jeux d’exercice auxquels son premier état d’indépendance l’avait habituée.

La dame d’Aspremont était aussi bonne pour les deux prisonnières ; en une seule occasion elle se permit à leur égard un petit acte de tyrannie. Elle s’était imaginé (et un vieux confesseur qui radotait l’avait confirmée dans cette idée) que les Saxons étaient encore païens ou du moins hérétiques ; elle exigea donc péremptoirement de son mari que la mère et la fille, qui devaient être à son service et à celui de leur enfant, pour être dignes de remplir ces fonctions, fussent de nouveau admises par le baptême dans le sein de l’église chrétienne.

Quoique sentant la fausseté et l’injustice de cette accusation, la mère eut assez de raison pour se soumettre à la nécessité, et reçut dans toutes les formes, à l’autel, le nom de Martha, auquel elle répondit tout le reste de sa vie.

Mais Bertha montra en cette occasion un caractère qui ne s’accordait nullement avec sa docilité et sa douceur ordinaires. Elle refusa hardiment d’être admise une seconde fois dans le giron de l’église, dont sa conscience lui disait qu’elle était déjà membre, et d’échanger contre un autre le nom qui lui avait été autrefois donné sur les fonts baptismaux. Ce fut vainement que le vieux chevalier commanda, que la dame menaça et que sa mère conseilla et supplia. Pressée plus instamment en particulier par sa mère, elle finit par avouer un motif qu’on n’avait pas encore soupçonné. « Je sais, » dit-elle avec un torrent de larmes, « que mon père serait mort avant que je fusse exposée à une pareille insulte, et puis… qui m’assurera que les serments faits à la saxonne Bertha seront tenus si une Agathe française est substituée en sa place ? Ils peuvent me bannir, ajouta-t-elle, ou me tuer s’ils veulent ; mais si le fils de Waltheolf doit jamais revoir la fille d’Engelred, il reverra la même Bertha qu’il a connue dans les forêts d’Hampton. »

Tout raisonnement fut inutile : la vierge saxonne s’obstina ; et pour essayer d’ébranler sa résolution, la dame d’Aspremont parla