Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 24, 1838.djvu/257

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bleu… Hélas ! c’était un bonheur de songer qu’Hereward m’appartenait par cet engagement solennel ! — Écoute-moi, ma Bertha, » dit Hereward en lui serrant la main : « nous étions alors presque enfants, et quoique notre vœu fût innocent en lui-même, il avait néanmoins cela de coupable qu’il était prononcé devant une muette idole représentant un homme qui de son vivant avait été un sanguinaire et cruel magicien. Mais dès l’instant que l’occasion s’en présentera, nous renouvellerons notre vœu devant un autel véritablement saint ; nous promettrons de faire pénitence pour avoir dans notre ignorance adoré Odin, et pour nous rendre propice le vrai Dieu qui peut nous soutenir au milieu de ces tempêtes d’adversité auxquelles nous pouvons être en butte. »

Les laissant pour le moment à leur entretien d’amour si simple et si pur, nous raconterons en peu de mots tout ce que le lecteur a besoin de savoir de leur histoire séparée, entre la chasse du sanglier et le moment de leur rencontre dans les jardins d’Agelastès.

Dans cet état d’incertitude où se trouvent des proscrits, Waltheolf, père d’Hereward, et Engelred, père de Bertha, avaient coutume de réunir leurs tribus indomptées, tantôt dans les fertiles régions du Devonshire, tantôt dans les forêts sombres et désertes du Hampshire, mais toujours, autant que possible, à portée d’entendre l’appel du fameux Éderic le forestier, si long-temps le chef des Saxons insurgés. Les chefs que nous venons de citer étaient au nombre de ces derniers braves qui maintinrent l’indépendance de la race saxonne en Angleterre, et comme leur capitaine Éderic, ils étaient généralement connus sous le nom de forestiers, parce qu’ils vivaient de leur chasse lorsqu’ils étaient arrêtés ou repoussés dans leurs excursions. Cette vie leur fit faire un pas rétrograde dans la civilisation, et ils devinrent plus semblables à leurs vieux ancêtres d’origine germanique qu’à la génération qui les avait immédiatement précédés, et qui, avant la bataille d’Hastings, avait déjà fait de grands progrès dans les arts.

De vieilles superstitions avaient commencé à revivre parmi eux ; et, entre autres l’habitude des jeunes gens et des jeunes filles d’échanger leur foi dans ces cercles de pierres consacrées à Odin, en qui néanmoins ils n’avaient plus depuis long-temps une croyance aussi sincère que leurs ancêtres païens.

Ces proscrits le prirent aussi une autre coutume particulière aux anciens Germains. Les circonstances où ils se trouvaient amenaient naturellement les jeunes gens des deux sexes à se trouver souvent