Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 24, 1838.djvu/236

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ment : « Vous êtes un des initiés, Varangien ; prenez garde aux gens que vous amenez avec vous, quand peut-être vous ne seriez pas le bienvenu, même tout seul. »

Hereward fit signe qu’il la comprenait, et bientôt ils la perdirent de vue. L’allée serpentait agréablement sous les ombrages d’un jardin oriental, où des monceaux de fleurs, des labyrinthes d’arbustes fleuris et de hauts bouquets d’arbres rendaient doux et frais le souffle du vent du midi.

« C’est ici que nous devons user de toute notre circonspection, » dit Hereward à son compagnon en parlant à voix basse, « car ici, très vraisemblablement, s’est réfugiée la biche que nous cherchons. Laissez-moi donc passer devant, car vous êtes trop profondément agité pour un batteur d’estrades. Tenez-vous caché derrière ce chêne ; et que de vains scrupules d’honneur ne vous empêchent pas de vous enfoncer sous ce bois couvert, et sous la terre même si vous entendiez les pas d’un homme. Si les amants sont d’accord, Agelastès fait probablement sa ronde pour empêcher qu’on ne les trouble ! — Mort et furie ! c’est impossible, s’écria le hautain comte…. Notre-Dame des Lances rompues, arrache la vie à celui qui s’est voué à ton service, mais ne le soumets pas à ces poignantes douleurs ! »

Il sentit néanmoins la nécessité de garder un certain empire sur lui-même, et laissa sans plus de remontrances le Varangien poursuivre sa route, en tâchant néanmoins de ne pas le perdre des yeux. En faisant quelques pas du même côté, il put voir Hereward s’approcher d’un pavillon qui se trouvait à peu de distance de l’endroit où ils s’étaient quittés. Là, il le vit appliquer ses yeux d’abord, ensuite ses oreilles à une des croisées cachées par des arbustes odoriférants, qui empêchaient le jour d’y trop pénétrer. Il crut presque voir un vif intérêt se peindre sur la figure du Varangien, et il brûla d’avoir sa part des renseignements qui étaient parvenus à son guide.

Il se glissa donc, sans faire le moindre bruit, à travers le labyrinthe de feuillage qui avait voilé l’approche d’Hereward ; et ses mouvements furent si discrets, qu’il toucha l’Anglo-Saxon pour l’avertir de sa présence, avant que celui-ci eût remarqué qu’il s’approchait.

Hereward ne sachant pas d’abord qui l’avait ainsi approché, se tourna vers le nouvel arrivant avec un visage semblable à un charbon enflammé ; mais reconnaissant bientôt le comte, il haussa les