Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 24, 1838.djvu/184

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question à laquelle tu ne peux pas répondre raisonnablement. — Tu as aujourd’hui, répondit le Varangien, fait un affront mortel à un grand prince que ton maître appelle son allié, et par qui tu as été reçu avec toutes les marques de l’hospitalité. Tu l’as déshonoré comme un paysan, dans un divertissement, en déshonorerait un autre, et cet opprobre, tu le lui as imprimé en face même des chefs et des princes de son empire, et des nobles de toutes les cours de l’Europe. — C’était à ton maître à s’offenser de ma conduite, dit le Français, s’il l’a réellement considérée comme un affront. — Cela n’eût pas été d’accord avec les mœurs de son pays ; et d’ailleurs, nous, fidèles Varangiens, nous nous estimons liés par notre serment, tant que notre service dure, à défendre pied à pied l’honneur de notre empereur comme son territoire. Je te dis donc, sire chevalier, sire comte, ou quel que soit ton titre, qu’il y a querelle à mort entre toi et la garde varangienne, à toujours et jusqu’à ce que tu l’aies vidée en combat franc et loyal, corps à corps, avec l’un des gardes du corps impériaux, lorsque le service et l’occasion le permettront… et Dieu montre le droit ! »

Comme cette conversation avait lieu en langue française, elle ne fut point comprise de la plupart de ceux qui se trouvaient en ce moment à portée de l’entendre ; et la princesse, qui attendait avec quelque étonnement que le croisé et le Varangien eussent fini leur conférence, dit avec intérêt au comte, lorsqu’elle fut terminée : « Je pense que vous regardez la situation de ce pauvre homme comme trop éloignée de la vôtre pour songer à vous mesurer avec lui en ce qu’on appelle un combat chevaleresque. — Sur une telle question, répliqua le chevalier, je n’ai qu’une réponse à faire à toute dame qui ne se couvre pas d’un bouclier, comme ma Brenhilda, et qui ne porte point une épée au côté et un cœur de chevalier dans sa poitrine. — Et supposez pour un moment, reprit la princesse Anne Comnène, que je possédasse de tels titres à votre confiance, quelle réponse me feriez-vous ? — Je n’ai pas de raison pour vous la cacher. Le Varangien est un homme brave et vigoureux ; il est contraire à mon vœu de décliner son cartel, et peut-être dérogerai-je à mon rang en l’acceptant ; pourtant le monde est grand, et il y est encore à naître celui qui a vu Robert de Paris éviter la face d’un mortel. Le pauvre homme qui nourrit une si étrange ambition verra son désir satisfait par le moyen de quelque brave officier des gardes de l’empereur — Et alors ? — Hé bien ! alors, comme l’a dit ce brave soldat, Dieu montre le droit ! — Ce qui signifie que