Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 24, 1838.djvu/153

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nobles résolutions ? — Vous pouvez faire peu de cas de mon courage de femme, si telle est votre volonté, mon père, répliqua la comtesse ; mais je parle en présence d’un témoin qui peut attester que je ne mens pas lorsque je dis qu’un homme de moitié moins âgé que vous n’aurait pas exprimé ce doute impunément. — Oh ! que le ciel me protège des éclairs que vos yeux lancent par colère ou par mépris, répliqua Agelastès ; je porte sur moi une égide qui me garantit de ce que j’aurais pu craindre sans cela ; l’âge, avec ses infirmités, a aussi ses avantages. Peut-être d’ailleurs désirez-vous trouver un homme comme moi, et en ce cas je m’estimerais heureux de vous rendre les services qu’il est de mon devoir d’offrir à tous les dignes chevaliers. — Je vous ai déjà dit qu’après l’accomplissement de mon vœu, » répondit le comte Robert en levant les yeux au ciel et en se signant, « il n’y a rien au monde que j’aie plus à cœur que de rendre mon nom célèbre par les prouesses qui conviennent à un vaillant chevalier. Quand on meurt sans renommée, on meurt pour toujours. Si mon aïeul, Charles, n’avait jamais quitté les misérables rives de la Saale, il ne serait pas aujourd’hui beaucoup plus connu que le vigneron qui taillait sa vigne sur le même territoire ; mais il se comporta en brave, et son nom est immortel dans la mémoire des chevaliers . — Jeune homme, dit le vieux Grec, quoiqu’il n’arrive que rarement à ce pays d’être visité par des gens tels que vous (que je suis prêt à servir et à apprécier), il n’en est pas moins vrai que je suis fort à même de vous être utile dans l’affaire que vous avez tant à cœur. Mes relations avec la nature ont été si intimes et si longues que, pendant leur durée, elle a disparu à mes yeux pour être remplacée par un monde avec lequel elle n’a presque rien de commun. Les trésors curieux que j’ai ainsi découverts sont inaccessibles aux recherches des autres hommes, et ne peuvent être dévoilés aux yeux de ceux dont les exploits doivent être resserrés dans les circonstances ordinaires de la vie. Aucun romancier de votre romantique pays n’a tiré de son imagination des aventures si extraordinaires et si propres à exciter l’étonnement de ceux qui les écoutent en cercle, que celles que je sais ; et ce ne sont pas de frivoles inventions : elles sont fondées sur la réalité seule ; en outre j’ai la puissance de fournir les moyens de terminer chacune de ces aventures. — Si telle est votre véritable profession, dit le comte français, vous avez trouvé un des hommes que vous cherchez ; et mon épouse et moi nous n’avancerons point d’un pas sur cette route avant que vous nous ayez indiqué quelqu’une de ces