Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 24, 1838.djvu/116

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Quand les acclamations se furent calmées, Alexis continua : « Je répète encore que mon fidèle grand domestique et ceux qui agissent sous ses ordres auront soin de confier l’exécution de la partie de nos ordres qui pourraient avoir l’air d’une agression, à des troupes d’un extérieur et d’un langage étrangers ; et ceux-ci, je le dis avec douleur, sont plus nombreux dans notre armée impériale que nos sujets naturels et orthodoxes. »

Le patriarche interposa ici son opinion. « Il y a une consolation, dit-il, dans la pensée que les naturels romains sont peu nombreux dans l’armée, puisqu’un métier tel que la guerre est plus convenablement rempli par ceux dont les doctrines, aussi bien que les actions, méritent la condamnation éternelle dans l’autre monde. — Révérend patriarche, répliqua l’empereur, nous ne soutiendrions pas volontiers, avec les barbares infidèles, que le paradis doit se gagner par le sabre ; néanmoins nous espérerions qu’un Romain mourant en combattant pour sa religion et son empereur peut avoir tout aussi bonne chance d’être admis dans le ciel, qu’un homme qui meurt en paix et les mains pures de sang. — Il me suffira de dire, reprit le patriarche, que les doctrines de l’Église sont moins indulgentes. Elle est elle-même pacifique, et la promesse de ses grâces est pour ceux qui ont été des hommes de paix. Cependant ne croyez pas que je ferme les portes du ciel à un soldat à cause de cette qualité, s’il croit à toutes les doctrines de notre Église, et se conforme à toutes nos observances ; encore moins condamnerais-je les sages précautions de Votre Majesté pour diminuer le pouvoir et éclaircir les rangs de ces hérétiques latins ; ces hommes qui viennent ici nous dépouiller, et piller peut-être l’Église et le temple, sous le vain prétexte que le ciel leur permettra, à eux souillés de tant d’hérésies, de reconquérir la terre sainte, que de vrais chrétiens orthodoxes, les prédécesseurs sacrés de Votre Majesté, n’ont pas pu défendre contre les infidèles. J’espère bien que Votre Majesté ne permettra pas aux Latins de former un seul établissement, sans qu’on y érige une croix dont les quatre branches soient d’égale longueur, au lieu de cette damnable erreur qui prolonge, dans les églises d’Occident, la partie inférieure de ce très saint emblème. — Révérend patriarche, répondit l’empereur, ne croyez pas que nous pensions légèrement de vos importans scrupules ; mais la question maintenant n’est pas de savoir de quelle manière nous pourrons convertir ces hérétiques latins à la vraie foi, mais comment nous pourrons éviter d’être envahis par leur nombre qui est semblable