Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 23, 1838.djvu/398

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Il se dirigea avec elle vers la tour, et monta escaliers sur escaliers, échelles sur échelles.

La résolution de Catherine l’abandonna. « Je ne vous suivrai pas plus loin, dit-elle. Où me conduisez-vous ? Si c’est à la mort, je puis mourir ici. — Je ne vous conduis pas à la mort, jeune folle, mais seulement sur les murailles du château, » dit Ramomy ouvrant les deux battants d’une porte garnie de fer qui donnait sur la plate-forme du château. Là des hommes préparaient des mangonneaux (c’est ainsi qu’on appelait des machines de guerre pour lancer des flèches), mettaient en état des arbalètes, et entassaient des pierres. Mais le nombre des défenseurs du château n’excédait pas une vingtaine, et Catherine put apercevoir chez eux des signes de doute et d’hésitation. — Catherine, reprit Ramorny, je ne puis abandonner ce poste important pour la défense du château ; mais je puis vous parler ici aussi bien qu’ailleurs. — Parlez, répondit Catherine ; je suis prête à vous entendre. — Catherine, vous avez découvert un secret terrible ; aurez-vous assez de fermeté pour le garder ? — Je ne vous comprends pas, sir John, répliqua la jeune fille. — Vous me comprenez. J’ai tué… assassiné, si vous aimez mieux, mon ancien maître, le duc de Rothsay ; l’étincelle de vie que vous vouliez entretenir a été sans peine étouffée. Ses dernières paroles furent un appel à son père. Vous pâlissez !… Remettez-vous, vous avez encore quelque chose à entendre. Vous connaissez le crime ; mais vous ignorez ce qui l’a provoqué. Regardez ; ce gantelet est vide. J’ai perdu ma main droite en le servant, et quand j’ai été hors d’état de lui être utile, j’ai été chassé comme un chien édenté, mon infortune a été tournée en ridicule ; on m’a conseillé de me retirer dans un cloître, au lieu de ces châteaux et de ces palais où ma naissance et mon rang me donnent droit d’habiter ! Pensez à cela… ayez pitié de moi, et assistez-moi. — Et pourquoi demandez-vous mon assistance, » dit la jeune fille tremblante ; je ne puis ni réparer votre perte, ni effacer votre crime. — Vous pouvez garder le silence sur ce que vous avez vu et entendu dans le jardin. Je ne vous demande que l’oubli ; car vos paroles, je le sais, seront écoutées, soit que vous racontiez les choses qui se sont passées, soit que vous disiez le contraire. Le témoignage de votre compagne, cette musicienne étrangère, ne pèsera pas la tête d’une épingle. Si vous m’accordez ce que je vous demande, je m’en reposerai pour ma sûreté sur votre promesse, et j’ouvrirai la porte à ceux qui ap-