Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 23, 1838.djvu/322

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blanche, avait été remis en délibération devant l’assemblée que son père nourricier Torquil du Chêne, ancien forestier, parut avec ses huit fils, les plus beaux hommes du clan, et demanda que le bannissement fût révoqué. Il parla avec beaucoup d’autorité, car il était lui-même taishalar, ou voyant, et passait pour avoir commerce avec le monde invisible. Il assura qu’il avait fait une cérémonie magique appelée Tine Égan, par laquelle il avait évoqué le diable, et qu’il avait arraché de lui l’aveu qu’Éachin, ou Hector Mac-Jan, était le seul homme qui sortirait sans blessure et sans tache du combat qui devait bientôt avoir lieu entre les deux camps ennemis. Torquil du Chêne conclut en disant que la présence de la personne désignée par le sort était indispensable pour assurer la victoire. « J’en suis si bien convaincu, ajouta-t-il, que si Éachin ne combat à sa place dans les rangs du clan de Quhele, ni moi son père nourricier, ni aucun de mes huit fils, nous ne lèverons une arme dans cette querelle. »

Ce discours excita quelque alarme, car la défection de neuf hommes, les plus robustes du clan, était une affaire sérieuse, surtout si le combat, comme le bruit s’en répandait, devait être décidé par un petit nombre de chaque côté. L’ancienne superstition touchant le nourrisson de la biche blanche fut contrebalancée par de nouveaux préjugés, et le père saisit cette occasion pour présenter au clan ce fils long-temps caché ; la jeunesse, la beauté, la vivacité, la haute taille, les membres agiles du jeune Conachar excitèrent l’admiration de tous les hommes du clan, et ils le reconnurent avec joie comme héritier et fils de leur chef, malgré les mauvais présages qui s’attachaient à sa naissance et à la manière dont il avait été élevé.

« D’après ce récit, milord, continua le gantier. Votre Seigneurie conçoit aisément pourquoi je compte sur un bon accueil dans le clan de Quhele ; vous pouvez aussi comprendre combien il serait imprudent à moi d’y emmener Catherine. Et c’est là, noble lord, la plus terrible de mes inquiétudes.

— Nous en allégerons le poids, répondit sir Patrick ; et je m’exposerai, bon Glover, pour toi et la fille. Mon alliance avec Douglas me donne quelque crédit auprès de sa fille Marjory, duchesse de Rothsay, l’épouse négligée de notre prince opiniâtre. Comptez, bon Glover, qu’à la suite de cette noble dame votre fille sera aussi en sûreté que dans un château fort. La duchesse tient maintenant sa maison à Falkland ; château que le duc d’Albany