Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 23, 1838.djvu/305

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peut être aussi dangereux de tomber d’une potence que d’y être accroché. »

En parlant ainsi il montait l’échelle, et s’étant assuré que les deux hommes d’armes qui le suivaient tenaient le corps, il coupa la corde, et les aida lui-même à soutenir le criminel presque sans vie.

Avec beaucoup d’adresse et de force, le corps de Bonthron fut déposé à terre, et quand on se fut assuré qu’il y avait encore en lui un reste de vie, quoique bien faible, on le transporta au bord de l’eau ; là nos trois compagnons purent éviter toute observation à la faveur de la hauteur de la rive, tandis que Dwining cherchait à ramener le meurtrier à la vie par les secours dont il s’était muni.

Le médecin commença par débarrasser le patient de ses fers que l’exécuteur avait laissés ouverts à dessein, et en même temps il enleva les nombreux bandages par lesquels il avait été suspendu. Les efforts de Dwining ne réussirent pas sur-le-champ ; car, malgré toute l’adresse avec laquelle l’appareil avait été construit, les sangles destinées à soutenir le corps avaient cédé considérablement, et la suffocation était imminente. Mais l’habileté du médecin triompha de tous les obstacles ; et, après avoir éternué et s’être étendu avec deux ou trois convulsions, Bonthron donna une preuve certaine de son retour à la vie ; il saisit la main de l’opérateur qui lui versait un cordial sur la poitrine et le cou, et dirigeant la bouteille vers ses lèvres, il en avala, presque de force, une assez forte dose.

« C’est une essence spiritueuse deux fois distillée, » dit le médecin étonné, « elle déchirerait le gosier et brûlerait l’estomac de tout autre homme. Mais cette brute extraordinaire ressemble si peu aux autres créatures humaines, que je ne serais pas étonné qu’elle lui rendît l’usage complet de ses facultés. »

Bonthron, comme pour confirmer ceci, se leva sur son séant, regarda autour de lui d’un air égaré, et donna quelques signes de connaissance.

« Du vin, du vin ! » furent les premiers mots qu’il fit entendre.

Le médecin lui donna un verre de vin médicamenté et mêlé d’eau. Bonthron le rejeta en lui donnant l’épithète peu honorable de lavage de ruisseau, et répéta ces mots : « Du vin, du vin ! — Prends-en donc, au nom du diable, s’écria Dwining, puisque lui seul peut juger de ta constitution ! »